N°11 - 2003
Sommaire
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Etats-Unis - Irak
- La politique de la guerre
(C.-A. Udry)
Ordre impérialiste / ordre intérieur
- Ces droits qu'on écrase (P. Gilardi)
Israël-Palestine
- Débat: quelles voies pour la libération de la Palestine historique ?
La marchandisation du monde
(M. Husson)
AGCS
- Renforcer le pouvoir des transnationales
(D. Lopreno et C.-A. Udry)
Chypre
- L'étrange solitude d'un combat internationaliste
(G. Mitralias)
Suisse
- Orange, première grève dans la téléphonie mobile
-Les nouvelles formes du chômage (pdf)
(J.-F. Marquis)
France
- Bras de fer sur les retraites
(F. Chesnais)
A lire
- La guerre continue
(Geoff Simons)


Un contre-cyclone

L es assureurs savent annuler un contrat. Ils viennent de le faire, ce 16 mars, pour les hélicoptères mis à disposition des inspecteurs de l'ONU en Irak. Cinq sur huit ont donc quitté Bagdad, pour rejoindre leur base à Chypre. Ce sont des hélicoptères américains du type Bell212. Les trois autres sont des Mi8s russes. Leurs assureurs doivent être moins pointilleux ou leur prix sur le marché dévalué. De quel meilleur signal peut-on disposer, dans ce monde marchand, qu'un déluge de bombes va s'abattre très vite sur l'Irak et son peuple, avec un risque écarté: celui d'endommager cinq hélicoptères de l'ONU, assurés.

A u même moment, Bush, Blair, Aznar - et leur hôte-serviteur le premier ministre portugais José Manuel Durao Barroso, rarement mentionné dans la presse - se réunissaient dans l'archipel portugais des Açores. Une île. Cette rencontre de 45 minutes n'aurait pu être tenue dans aucune des capitales des trois chefs d'Etat, sans une mobilisation militaire sans précédent. Et cela pour faire face aux manifestations contre la guerre qu'elle aurait suscitées.

Ce seul fait symbolise la substance de la démocratie que prétend représenter ce trio de chefs d'Etat. L'un, Bush, financé par les grandes firmes et élu par la Cour suprême, après avoir perdu le décompte des votes face au démocrate Gore. L'autre, Blair, longtemps porté à bout de bras par le groupe de presse réactionnaire de Rupert Murdoch et dont l'action est rejetée par une majorité des élus du New Labour (qui a senti le vent tourner) et par sa base. Le troisième, Aznar, chef de file d'un parti qui ne renie pas ses liens historiques avec le général Franco, qui, lui, a reçu, avec les honneurs, Saddam Hussein.

Les analogies avec les années trente, offertes il y a encore quelques semaines par la presse, pour caractériser le danger représenté par Saddam Hussein sont frappées de nullité. A moins que l'on en trouve une entre les projets d'agressions militaires de Bush et sa volonté de «remodeler le monde». Une formule qu'un dictateur allemand appréciait dans les années trente. N'est-ce d'ailleurs pas la perception de ce danger pour la planète et pour ses peuples qui explique, en partie, l'ampleur de la mobilisation internationale contre la guerre, ce samedi 15 mars, y compris aux Açores ?

A lors que Bush se trouvait sur une île, Dick Cheney donnait des entretiens sur les deux grandes chaînes américaines CBS(Face the Nation) et NBC (Meet the Press). Il insistait sur une prétendue volonté de l'Administration: «Les ressources naturelles de l'Irak reviendront au peuple irakien.»

Ce même Dick Cheney, selon une enquête du quotidien The Guardian (12 mars 2003), continuait, en 2001, à percevoir 1 million de dollars d'Halliburton, la société dont il fut un des dirigeants. Cette firme est l'une des cinq qui ont reçu de l'USAID les plus gros contrats depuis la seconde guerre mondiale pour la «reconstruction de l'Irak». Plus exactement, Halliburton doit participer à la réorganisation de la production pétrolière irakienne. Aucune question ne fut posée à ce sujet au vice-président des Etats-Unis par les journalistes de laCBS ou de la NBC.

Blair a tenu, avec cette pâle duplicité qui le caractérise, les mêmes propos. Alors que la presse anglaise n'a cessé de donner des détails sur les firmes pétrolières anglaises qui se positionnent et sur le rôle des troupes britanniques pour prendre le contrôle des champs pétroliers de Rumaila.

Ce cynisme et ces mensonges ne sont que la version policée d'une campagne de propagande menée aux Etats-Unis qui aboutit à mettre le monde cul par-dessus tête. Tuer, déplacer des centaines de milliers d'êtres humains, étrangler un pays et sa population durant 12 ans deviennent de simples moyens «pour assurer la sécurité» des Etats-Unis. Ceux qui perpétrent ce qui a été qualifié de «génocide» sont présentés comme les victimes d'un «complot terroriste international».

A ce degré de contre-vérité, l'analogie avec la propagande de Goebbels, faite par une ministre allemande, touche juste. L'extrémisme religieux de milieux gouvernementaux étasuniens - qui se mesure peu en Europe - donne à cette campagne de bourrage de crâne les traits d'une croisade fanatique qui fait frémir.

F ace à cela, la mobilisation antiguerre la plus massive doit se maintenir. L'échéance de mobilisation pour le samedi 22 mars traduit une conscience aiguë de l'enjeu. Le mouvement en Grande-Bretagne en a déjà pris l'initiative. Un contre-cyclone des Açores se forme. Les appels à des grèves se multiplient en Espagne, en Grande-Bretagne, en Italie. La mobilisation ne sera pas arrêtée par les premiers tirs de missiles de croisière. réd.

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