N° 4 Janvier 2002

Argentine: ouverture d'un processus révolutionnaire

Une rébellion pour un «pays différent»

Nora Ciaponi*

* Nora Ciaponi est une syndicaliste disposant d'une large expérience. Elle est une des dirigeantes du MAS (Mouvement vers le socialisme). Cette contribution analyse la situation argentine. Elle nous permet de saisir des éléments d'une réflexion en cours au sein d'un courant révolutionnaire.

Les journées que nous traversons s'accélèrent, comme cela se produit toujours dans de telles situations. Elles pourront être caractérisées avec plus de précision dans un certain temps. De ce point de vue, on peut les définir comme un Argentinazo1 ou comme «une grande rébellion populaire spontanée qui a ébranlé tout le pays» qui a ouvert un processus révolutionnaire, en renversant deux gouvernements en une semaine. Cette définition peut nous servir comme point de départ pour tracer le profil d'un mouvement profondément démocratique qui englobe de très vastes secteurs sociaux et qui traverse toutes les classes populaires. Sans aucun doute, au centre du mouvement réside la mise en question de l'ensemble du régime politique et de chacune de ses institutions.

Le moteur d'un soulèvement

A l'origine de cette «rébellion populaire», on retrouve la catastrophe économique et sociale que traverse le pays. Elle est le produit de trois éléments décisifs: 1- la crise capitaliste (une récession profonde depuis quatre ans); 2- les conséquences socio-économiques sur un pays dit émergent du processus de mondialisation du capital; 3° les spécificités propres au modèle imposé en Argentine au cours de la décennie du président péroniste Carlos Menem (1989-1999).

Ces traits particuliers peuvent être résumés ainsi: dénationalisation de l'économie (c'est-à-dire prise de contrôle par les multinationales impérialistes); privatisation à outrance de toutes les ressources de base (routes, eau, électricité, téléphone); accroissement brutal de la perte de toute indépendance face à l'impérialisme qui s'exprime non seulement sous la forme de l'imposante dette extérieure, mais aussi sous celle du contrôle politique et économique sur l'Argentine et sur ses institutions du Fonds monétaire international (FMI) et du gouvernement des Etats-Unis.

Le moteur de l'explosion que nous vivons - qui touche le cœur du pouvoir politique - a été la faim que connaissent des millions de familles sans emploi et des salariés paupérisés, ainsi que le naufrage de très larges secteurs desdites classes moyennes: pour l'essentiel, des salariés relativement stables - employés, fonction publique - ou de faux indépendants. Tous ont été dépossédés et escroqués à l'occasion d'une cascade de baisses salariales, de licenciements, de suspension de la possibilité d'utiliser leurs cartes de crédit et de l'expropriation de leurs épargnes et comptes salariaux. Ces dernières mesures de restriction à l'accès aux comptes bancaires sont qualifiées de corralito2.

En toile de fond se profile un thème qui a pris force depuis un certain temps et qui s'est manifesté avec vivacité dans la rue depuis le 20 décembre 2001: une forte réaction face à la perte d'identité nationale liée à la subordination socio-économique à l'impérialisme. A l'occasion du conflit de la compagnie d'aviation Aerolineas Argentinas - rachetée pour rien par la compagnie espagnole Iberia, puis mis quasiment en faillite - cette sensibilité avait déjà été exacerbée.

C'est ainsi qu'il faut comprendre pourquoi autant de drapeaux argentins sont déployés par des millions de personnes. Dans ce contexte, ce geste possède un contenu profond et progressiste. Il faut le lire à partir d'un élément décisif: l'appropriation par des secteurs entiers du mouvement de masse du thème de la dette extérieure vue comme un des problèmes clés pour trouver une voie de sortie à la débâcle économique. C'est sous cet angle qu'il faut interpréter les attaques contre les banques impérialistes, les McDonald's et les filiales des sociétés multinationales, symboles du processus de privatisation et de dénationalisation, et, enfin, les agressions à l'encontre de tout ce qui porte les traits d'éléments destructeurs de l'indépendance du pays.

Dans cette rébellion populaire s'exprime avec urgence la recherche d'un projet pour «un pays différent». Dans la rue, cela a suscité la reconquête d'une confiance pour une solution collective - après des années de tentatives désespérées de trouver des solutions individualisées. La conscience et l'action de millions de femmes et d'hommes progressent vite et s'enrichissent sans cesse au cours de ce mouvement, alors que les problèmes qui ont suscité la rébellion, la grave crise politique et celle des institutions bourgeoises restent toujours entiers. Ce qui renforce à son tour le rejet des institutions traditionnelles et consolide la haine envers ce qui représente les forces répressives (police et armée).

Retrouvailles entre générations

Il est toutefois nécessaire de préciser aussi bien les avancées effectuées que les limites propres à ce mouvement spontané, ou semi-spontané si l'on tient compte, d'une part, des expériences accumulées au cours de la période antérieure à décembre 2001 et, d'autre part, du nombre de militants et de militantes des années 70-80 qui ont joué un rôle, souvent individuel, dans ce vaste mouvement. Comprendre avancées et limites est une exigence qui s'impose à l'ensemble de la gauche révolutionnaire organisée et à des milliers de nouveaux et d'anciens activistes. A partir de là, une tâche se dessine: tout faire pour que s'élargisse la brèche ouverte par la gigantesque mobilisation et faire émerger des objectifs de transformation socialiste.

Dans cette perspective, il s'agit de participer à et d'impulser tout type d'organismes d'autodétermination. Des comités divers se forment dans les quartiers, se renforcent au cours des jours, deviennent le lieu d'assemblées démocratiques débattant de questions immédiates (électricité, eau, nourriture, logement) et aussi de la politique du FMI ou des mesures prises par le nouveau président péroniste Eduardo Duhalde, nommé le 2 janvier 2002 par les institutions parlementaires largement discréditées.

Certes, le cours général des événements ne dépend pas de notre intervention. Mais nous devons faire des efforts collectifs pour nous insérer au mieux dans le mouvement. Cela alors que des milliers de camarades regardent, discutent, approuvent ou mettent en question les propositions des forces de la gauche et où les grands partis traditionnels - le Parti justicialiste (PJ) péroniste, l'Union civique radicale (UCR, de De la Rua) et le Frepaso (Front pour un pays solidaire) - sont très déconsidérés.

A ce propos, il est significatif que se réengagent dans la lutte d'anciens camarades, de nombreux militants et militantes de grande valeur qui se réclament de l'histoire de l'ancien et grand MAS (Mouvement vers le socialisme) 3. Ils ont participé à des barricades, à l'organisation d'habitants des quartiers ou des travailleurs sur leur lieu de travail, ou encore des étudiants. Ils y ont apporté leur expérience aux côtés de la présence massive de milliers de jeunes et de travailleurs qui se sont lancés, nouvellement, dans l'activité politique, en quelques heures, en quelques jours.

Ils cherchent, instinctivement, des structures démocratiques et organisées d'expression. Il ne faut pas oublier que l'écho des courants issus du MAS est renforcé par l'aura du député Luis Zamora, socialiste révolutionnaire, élu sur la liste Autodétermination et Liberté (AyL). Dans le passé, Luis Zamora a été soutenu par le MAS historique. Aujourd'hui, il est le seul parlementaire qui dispose d'une véritable audience populaire. Il a été l'une des figures de la lutte contre la privatisation puis la liquidation de Aerolineas Argentinas, une liquidation qui, selon ses termes, a été identifiée par de larges fractions populaires à la liquidation de l'Argentine et des emplois.

La rébellion démocratique - avec ses traits forts anti-impérialistes et une dynamique de démocratie directe - poursuit de façon avide des changements, est à la recherche de remèdes, entre autres pour une raison fondamentale: parce qu'elle se déroule sans avoir en vue une alternative à la débâcle capitaliste. Dans ce contexte, les analogies historiques avec d'autres processus révolutionnaires ne sont pas obligatoirement fonctionnelles et peuvent conduire à des impasses.

Les organismes populaires et organisations qui préexistaient au soulèvement de décembre dans notre pays (mouvement des chômeurs, piqueteros, organisations de la gauche révolutionnaire, etc.) ont été, c'est un fait, amplement dépassés par le mouvement de masse et sa capacité d'agir de façon indépendante.

Cela ne signifie évidemment pas que le pays n'a pas une histoire et que tout ce qui se passe serait apparu, d'un coup, comme un éclair dans une nuit étoilée.

Le mouvement des chômeurs, les secteurs de travailleurs en révolte contre les licenciements et les baisses salariales, les émeutes à l'intérieur du pays, la grande grève des enseignants il y a quelques mois dans la province de Buenos Aires, toutes ces mobilisations ont été marquées par l'intervention de la gauche et de ses militant·e·s.

Il en va de même pour les résultats des élections législatives du 14 octobre 2001 avec une abstention massive (alors que le vote est obligatoire), ses votes en blanc et ses votes pour la gauche révolutionnaire (7% des suffrages exprimés), ainsi que pour la consultation populaire impulsée en décembre par la CTA (Centrale des travailleurs argentins). Ce référendum «parallèle» en faveur d'un plan contre la pauvreté a réuni plus de 3 millions de votes.

Tout cela a stimulé l'apparition de manifestations de rébellion populaire. Elles ont été aiguisées, jour après jour, par les mesures d'un gouvernement qui pillait sans limites le pays. Dans ce contexte, on a vu une relance, un élargissement, un développement des piqueteros (coupeurs de route), des barricades, des brasiers au milieu des routes et d'autres méthodes d'affrontement que l'on avait connues au cours du cycle de luttes des années 70. Puis se sont développées les mobilisations massives de casseroleurs et casseroleuses.

Ainsi, après le 19 décembre, ont conflué le vieux et le nouveau: les mères de la place de Mai et les jeunes coursiers à moto (qui distribuent le courrier), la gauche organisée et non organisée, nouvelle et ancienne, essentiellement d'origine trotskyste.

Une situation pré-révolutionnaire

Avec le risque inévitable d'utiliser de vieux concepts afin de caractériser des phénomènes plus contradictoires que dans d'autres périodes historiques de la lutte de classes en Argentine (étant donné les immenses transformations sociales et la crise aiguë d'une alternative au système capitaliste), nous croyons toutefois nécessaire de nous appuyer sur quelques éléments de fond (de méthode) pour définir comme pré-révolutionnaire la situation que nous traversons.

Voici les raisons de cette qualification: 1° une grande instabilité et une rupture de l'équilibre du système de domination politique bourgeoise face à la puissance de montée du mouvement de masse, ce qui accentue les contradictions internes du camp des dominants et met en crise l'ensemble des institutions du régime; 2° l'opposition croissante et massive de larges secteurs sociaux à la totalité des mesures prises par le gouvernement Fernando de la Rua-Domingo Cavallo (son ministre de l'Economie), puis à celles qu'ont voulu appliquer Adolfo Rodriguez Saa (qui entre en fonctions le 23 décembre) et son successeur Eduardo Duhalde (voir ci-contre); les nouveaux maîtres du pays et l'impérialisme sont identifiés comme les responsables-ennemis de la paupérisation et de la désafiliation sociale de millions de personnes; 3° l'action de millions de travailleurs et de couches populaires a manifesté sa force à l'occasion des journées révolutionnaires contre la faim, lors des marches répétées et massives des casseroleurs et casseroleuses, au cours des affrontements de la jeunesse avec la police (entre autres dans diverses villes de province) et, surtout, à l'occasion des deux jours et deux nuits (du 19 au 21 décembre) où la capitale fédérale a été occupée, encerclée, ce qui a conduit à une paralysie du centre du pouvoir politique; 4° l'apparition d'une large avant-garde qui fait ses premières expériences politiques dans l'action et qui développe une posture anticapitaliste et de gauche; ce surgissement se combine avec la réactivation de milliers de camarades des couches politisées des années 70 et 80.

Nous ne pensons pas que nous faisons face à une alternative que l'on pourrait décrire de la sorte: soit la réabsorption dans un cadre capitaliste et bourgeois de l'Argentinazo; soit un Argentinazo qui va jusqu'au bout (dans le sens d'une véritable révolution sociale). Nous ne croyons pas que nous sommes face à une situation historique où ce genre de propositions disjonctives nous est utile afin de nous orienter dans la réalité présente.

Nous le disons dans la mesure où, d'une part, n'existe pas, aujourd'hui, dans de très larges secteurs de masse une conscience anticapitaliste et encore moins une projection de type socialiste (ce qui est aggravé par l'absence de références à l'échelle mondiale qui pourraient étayer une telle perspective) et, d'autre part, parce que le développement d'organismes démocratiques de base ne peut être qualifié (encore) d'organismes de double pouvoir (structurant un pouvoir venu d'en bas qui ferait face au et défierait en tant que pouvoir potentiel le pouvoir en place). Nous devons donc nous préparer à une situation non-linéaire de convulsions, de transitions.

Dans un tel contexte, de nombreuses possibilités sont ouvertes, parmi lesquelles existe celle de l'ouverture d'une étape (notion intrinsèque à une période transitoire de ce type) révolutionnaire.

Toutefois, on ne peut ignorer que l'instabilité protéiforme et profonde dans laquelle nous vivons est grosse de tendances multiples, par définition difficiles à anticiper. Il est possible que nous nous dirigions vers une étape nettement offensive, de développement d'organismes de double pouvoir et du renforcement d'un pôle de la gauche révolutionnaire. Il est aussi envisageable que prenne forme une sorte de chaos, pouvant se prolonger un certain temps et ouvrant sur une conjoncture très déroutante et/ou grave. De même, nous ne pouvons exclure diverses options d'imposition d'un «ordre» bourgeois.

D'une telle approche nous tirons une conclusion banale, mais nécessaire à avoir à l'esprit en permanence: il faut suivre la situation avec une exigence de rigueur afin de percevoir toutes les oscillations du pouls social, politique. Dès lors, il est impératif de palper en quelque sorte les opinions, les réactions, les attentes qui s'expriment dans les quartiers déshérités de la ceinture de Buenos-Aires: face au gouvernement Duhalde; face aux mesures de dévaluation et de «pesification» (remplacement des dollars déposés par des pesos à un taux qui implique une perte élevée) qui provoquent déjà une envolée des prix, des désapprovisionnements (avec des accaparements spéculatifs); face à la paralysie de l'économie, à une récession se muant en dépression; face à l'ouverture ou à la fermeture du robinet financier par l'impérialisme américain. Voilà des éléments qui vont influer directement sur la conjoncture socio-politique dans la période à venir.

L'instabilité est provoquée par l'activité inlassable des masses populaires descendant dans la rue, l'occupant. Elles ne se fatiguent pas de proclamer qu'elles s'engageront, à tout moment, dans d'autres grandes mobilisations centrales si aucune réponse n'est offerte à leurs problèmes immédiats. Les nouvelles rébellions auront, dans leur forme et objectif, l'Argentinazo de décembre, mais très probablement se développeront à un degré supérieur.

De son côté la bourgeoisie va tenter par tous les moyens à sa disposition de bloquer et d'infliger un recul au processus révolutionnaire qui s'est ouvert, même si dans l'immédiat elle ne dispose pas des moyens pour atteindre un tel objectif.

Enfin, il me semble nécessaire d'avoir à l'esprit, afin de saisir les traits de l'étape ouverte en fin décembre, que des hauts et des bas se produiront, des ralentissements et des accélérations, comme dans chaque processus révolutionnaire. Et ce dernier sera marqué par des apprentissages, des réflexions s'affûtant, par des leçons apprises grâce à l'action et aux débats, par une accumulation de forces sociales et politiques.

Programme et revendications «d'en bas»

A une force socialiste révolutionnaire se pose, évidemment, la question de quel programme avancer? Un programme qui traduise les aspirations surgies dans la rébellion populaire et qui soit apte, dans ses grandes lignes, à répondre aux exigences avancées dans la rue, dans les quartiers, sur les lieux de travail. Un programme qui exprime donc, à la fois, les niveaux de conscience et d'organisation ainsi que les besoins de secteurs majoritaires de la population afin de mettre en avant les moyens de les satisfaire. Il en découle qu'il doit contenir une claire dimension anticapitaliste et de projection socialiste, c'est-à-dire être un programme d'urgence, un programme de transition propre à cette étape d'une crise pré-révolutionnaire.

Pour ce faire, il faut prendre appui sur les thèmes qui marquent une avancée essentielle dans la conscience populaire, tels que celui de la dette extérieure, qui est repris massivement par celles et ceux qui manifestent dans la rue. Ce dernier s'imposera toujours plus, étant donné la brutalité de la crise économique qui nous frappe. Le rejet de la dette extérieure - qui n'a rien à voir avec un moratoire de fait lié à une incapacité de paiement - peut s'accompagner d'une explication sur l'impératif de rompre avec le Fonds monétaire international (FMI), organisme de tutelle impérialiste. Dans les rues de notre pays ni Fernando de la Rua (qui a été contraint de s'enfuir en hélicoptère du Palais présidentiel), ni Domingo Cavallo, ni beaucoup d'autres ne peuvent se promener de manière tranquille. Par contre, les délégations du FMI (basé à Washington) entrent et sortent de l'Argentine sans problème. Ce fait trahit une attitude ambivalente - compréhensible - où une forte progression de la conscience anti-impérialiste coudoie une espérance encore présente «qu'ils vont [les Etats-Unis, le FMI] nous lancer une corde à laquelle nous pourrons nous rattraper». Cet espoir est entretenu par le gouvernement de Duhalde qui affirme: cette «aide» créera la condition pour résoudre le corralito.

Pourtant les faits prouvent que si le pays est en chute libre, cela est largement dû aux recettes du FMI appliquées par ses partenaires soumis de l'impérialisme: les couches dominantes parasitaires de l'Argentine.

Il est nécessaire d'expliquer que c'est l'ensemble du pays qui est placé dans un corral (dans un enclos) par ces politiques économiques, Il s'agit donc de rompre cet enclos. Il n'est pas possible d'attendre d'être sauvé par les mains qui nous ont mis et nous tiennent la tête sous l'eau.

Si les banques étrangères - leurs vitrines pour le moins - sont la cible, particulièrement en province, des jets de pierres, reste entière la question de leur nationalisation sous contrôle populaire. Et, dans ce cadre, s'impose une réorganisation d'un système bancaire, non seulement pour récupérer l'épargne, pour empêcher la fuite - qui continue - des capitaux, mais pour appliquer des mesures concrètes d'un plan d'urgence contre la misère et la faim. La même exigence se fait jour pour ce qui est des secteurs privatisés - que ce soit celui du pétrole (contrôlé par le capital impérialiste: la compagnie espagnole Repsol) et des (ex) services publics. La population les a reconnus comme les nouveaux maîtres du pays: alors que la paupérisation avance à grands pas, les tarifs de l'électricité, du téléphone, etc. sont parmi les plus élevés du monde.

Le droit au travail, à la nourriture, aux soins sanitaires, à l'éducation, au transport prend place dans le sillage de ces grands axes revendicatifs. Il faut relever que divers aspects d'un programme à élaborer - et qui le sera aussi dans la mesure où des secteurs du mouvement de masse s'approprient les revendications, les reformulent conjointement à la consolidation des organismes populaires qui renforcent leur autonomie et la dimension démocratique directe - ne sont pas «la propriété» de la gauche révolutionnaire. Ils sont déjà développés de façon magistrale par des femmes et des hommes qui participent aux Assemblées populaires. Par exemple, lors d'Assemblées réunissant des paysans, les propositions ayant trait à la solution du problème de la faim et de l'approvisionnement sont des plus concrètes.

Pour terminer, il m'apparaît que les revendications démocratiques occupent une place de choix et s'intègrent plus que jamais aux revendications économiques. Elles portent aussi bien sur le régime politique (contre le présidentialisme, contre le rôle de la Cour de Justice qui a légitimé les privatisations, etc) que contre la répression et pour le châtiment des assassins. Ces revendications doivent aussi avoir pour fonction d'assurer les plus amples libertés afin que la majorité populaire puisse s'auto-organiser, s'auto-déterminer, manifester...

1. Néologisme ou argentinisme, intraduisible en français. En Argentine, on dit d'un très beau but au football que c'est un golazo. La semi-insurrection ouvrière, étudiante et populaire de 1969 à Cordoba, deuxième ville du pays, est passée à l'histoire sous le nom de Cordobazo. Argentinazo est donc le nom donné au soulèvement qui a commencé dès le 19 décembre en Argentine.

2. Corral, en espagnol, signifie enclos. Corralito, signifie parc pour enfants. Autrement dit, l'argent ne pouvait pas sortir du parc, de la banque. Ces mesures ont été prises par le gouvernement du président radical de la Rua afin d'empêcher la fuite de capitaux, alors que les secteurs riches traditionnels et les nouvellement enrichis au cours des dernières décennies ont déjà placé leurs capitaux aux Etats-Unis, en Angleterre, en Italie, en Grande-Bretagne, en Espagne, en Suisse. Ces sommes équivalent, à peu de choses près, à la dette extérieure officielle.

3. Le MAS (Movimiento al socialismo) est une organisation trotskyste, révolutionnaire qui a disposé d'une fort importante implantation populaire et syndicale. Sa figure historique était représentée par Nahuel Moreno dans les années 70, puis 80. Le MAS a connu une crise ouverte. Divers courants sont donc issus du MAS historique: le MST (Mouvement socialiste des travailleurs), le plus fort quantitativement, et le nouveau MAS qui publie le mensuel Socialismo o barbarie.

 

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