Brésil

Alencar, vice-président, Lula et José Dirceu

Lula et José Dirceu

Gauche socialiste et démocratique
Mouvement pour un nouveau parti

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Les louanges adressées au gouvernement brésilien de Lula viennent, tous les jours, des sommets de la pyramide sociale et économique, et y compris politique, du capitalisme international.

Ainsi, Peter Hakim, président de l'Inter-American Dialogue, dans la prestigieuse revue américaine Foreign Affairs (numéro de janvier-février 2004) écrit: «Une année après [l'accession de Lula à la présidence] Washington et Wall Street applaudissent les mesures d'austérité de Lula. Malgré des tensions croissantes dans le domaine du commerce, il [Lula] a gagné l'admiration du secrétaire au Trésor des Etats-Unis, John Snow et de Horst Köhler [proposé par le gouvernement Schröder à la tête du FMI], le chef du Fond Monétaire International, pour avoir ramené le Brésil d'une situation de quasi défaut de paiement de la dette et pour avoir restauré sa crédibilité sur les marchés financiers internationaux.» (page 116).

Peter Hakim souligne que seul les contre-réformes internes (celles concernant la prévoyance vieillesse et les impôts ainsi que l'indépendance de la Banque centrale) ont été le véritable test pour juger de la crédibilité, plus exactement de la confiance que l'impérialisme devait avoir dans le gouvernement Lula.

Il souligne que pour ce qui a trait aux désaccords sur l'ALCA entre le Brésil et les Etats-Unis cela renvoie à des divergences d'intérêts entre des secteurs bourgeois brésiliens – qui s'expriment aussi au plan de la libéralisation mondiale du commerce entre des secteurs industriels, agro-industriels et de services américains et des secteurs bourgeois de l'Inde ou de la classe dominante en Chine – et des segments de l'économie visant à être protégés par des mesures de l'administration Bush, ainsi que des transnationales cherchant à accentuer la recolonisation du Brésil et du continent sud-américain (page 117-118). Ces certificats de services de bonne conduite pour le gouvernement Lula sont certifiés: impérialistes, IS0 9001.

Il y a là de quoi, au moins, suscité une réflexion urgente sur une alternative à créer au PT- gouvernemental. C'est ce qu'ont fait des dizaines et des dizaines de militant-e-s, d'intelectuels membres du PT, ou même fondateurs de ce parti, ainsi que des députés (tels Luciana Genro du MES, députée fédérale de l'Etat de Rio Grande do Sul ou de Heloïsa Helena, membre du courant Démocratie socialiste (DS), sénatrice de l'Etat Alagoas, dans le Nordest brésilien).

La dernière réorganisation du gouvernement brésilien, annoncée le 23 janvier 2004, ne laisse aucun doute sur la dynamique future du gouvernement Lula. Comme le dit le Financial Times du 24 janvier 2004, cette réorganisation: «récompense son plus important allié dans le gouvernement». C'est-à-dire le PMDB - Parti du Mouvement Démocratique Brésilien – dont le leader, José Sarney, actuel président du Congrès, a été, par le passé, président du Brésil. Cela pour assurer une transition, à la sortie de la dictature, lorsque Tancredo Almeida Neves lui a passé le témoin, en mars 1985. Sarney était son  vice-président.

Le PMDB dispose aujourd'hui de 77 députés fédéraux, de 23 sénateurs, de 6 gouverneurs, de 1'226 maires, de six millions d'affiliés et de 15 millions de sympathisants. Autrement dit, cette alliance gouvernementale va se projeter dans de nombreuses autres alliances dans le cadre des élections municipales à venir d'octobre 2004. Et le PMDB, qui possède de nombreux et puissants barons, va négocier, avec détermination, toutes les décisions importantes avec le PT-gouvernemental de Lula et chercher à renforcer ses positions, pour des batailles futures, face au mouvement populaire.

Une alternative, un nouveau parti est vraiment nécessaire, même si cela gêne ceux et celles qui, incrustés dans l'appareil d'Etat, se voient écartelés par un grand écart, difficilement supportable, entre, d'un côté,  une confirmation de leurs responsabilités gouvernementales (c'est le cas pour Miguel Rossetto, membre du courant Démocratie Socialiste, ministre du Développement agraire, c'est-à-dire d'une réforme agraire qui ne dispose pas des moyens de se concrétiser effectivement) et Heloïsa Helena, de l'autre côté, sénatrice, membre aussi de Démocratie Socialiste. C'est figure populaire qui s'est profilée dans une opposition politique et éthique, de classe, face au gouvernement Lula. Elle est, avec Luciana Genro, l'une des figures de proues féminines potentielles d'un futur nouveau Parti socialiste et démocratique.

Parions que nombreux seront ceux qui tenteront de tout faire pour mettre des bâtons dans les roues de ce projet qui dispose d'une réelle audience. Parmi eux, il y aura évidemment la direction du PT gouvernemental ainsi que le responsable des relations entre le PT-gouvernemental et la fraction parlementaire de «gauche» le soutenant. C'est-à-dire Aldo Rebelo. Il est à la tête d'un nouveau ministère intitulé: Ministère de la coordination politique. C'est un responsable du Parti communiste du Brésil (PCdoB), une organisation faite de militants et militantes engagés, mais dont les méthodes démocratiques sont entachées d'un passé mao-stalinien, qui certainement, laisse encore scories. Quant à José Dirceu, l'ancien responsable du PT pour les relations entre le PT-gouvernemental et la fraction parlementaire - il  dirigea d'une main de fer  le processus d'expulsion des «radicaux» (les quatre élus fédéraux) – il est devenu responsable, pour le PT-gouvernemental de la politique d'alliance entre les partis composant le gouvernement remanié.

A ces opposants organiques s'ajouteront, pour des raisons d'intérêts d'appareil - qui espérons-le ne domineront pas -, des organisations radicales comme le PSTU (Parti socialiste des travailleurs-unifiés), disposant d'une influence sociale effective et d'une base militante très engagée. Au sein même de la gauche historique du PT (voir sur ce site notre article sur le gouvernement Lula datant du 26 décembre 2002, rubrique Dossier) - qui semble avoir perdu la compréhension du sens de la dynamique politique effective du gouvernement Lula, dès sa création, et de la base socio-institutionnelle qui étaye cette orientation - des manœuvres peuvent fleurir.

Au fond, elles visent à tenter de se sortir du piège de la participation au gouvernement et, simultanément, de répondre à la saine réaction de militant·e·s de se rallier à une mobilisation unitaire pour un nouveau parti, socialiste et démocratique.

Ce moment difficile et délicat, où la raison politique risque de se laisser submerger par des "rages irréfléchies", peut déboucher sur un nouvel espoir, qui ne se concrétisera effectivement que dans la mesure où les ripostes de secteurs du mouvement des masses entreront en écho avec une alternative naissante au plan politico-organisationnel et programmatique.

Donc cette alternative ne doit pas seulement englober le passé le plus prestigieux du PT historique, mais doit produire des éléments d'orientation et de programme qui traduisent, d'une part, les besoins, les aspirations des masses qui surgissent sous le choc des altérations du tissu économique et social induites par la gestion néo-libérale au cours des deux mandats de Fernando Enrique Cardoso et de la première année du mandat de la présidence Lula, et, d'autre part, prendre en compte les mutations en cours à l'échelle continentale, aux plans politique, institutionnel, social, culturel, économique,  ainsi que les relations avec un impérialisme dont l'agressivité militaire et "néo-coloniale" particulière est renouvelée. Udry Charles-André (30 janvier 2004)

***

A. Qui sommes-nous ?

Nous faisons partie de celles et ceux qui:

a.   ont dénoncé la subordination indigne au système financier et la spéculation prédatrice qui en a résulté, à laquelle la nation brésilienne a été soumise avec l’implantation du modèle néolibéral imposé pendant les années 1990 ;

b.   n’ont jamais accepté, de manière passive, que les bénéfices permanents de la spéculation internationale puissent passer avant les intérêts de développement du peuple brésilien, juste et démocratique, à cause d’une prétendue dette externe qui n’a jamais été contrôlée et qui a été augmentée durant l’application de ce modèle économique ;

c.   ont dénoncé les privatisations qui ont abouti au bradage d'une grande partie de notre patrimoine - constitué d’entreprises publiques - à de grandes multinationales, avec presque toujours un financement de la Banque Nationale du Développement Economique et Social (BNDES) [institution brésilienne];

d.   défendent le lien cohérent avec l’histoire des luttes, des mots d’ordre et des revendications des classes laborieuses qui ont permis la victoire de Lula lors des présidentielles de [octobre] 2002, lorsque le peuple brésilien a montré son refus du modèle néolibéral ;

e.   appuient de manière permanente les luttes des classes laborieuses et de la jeunesse, les marches et les occupations des sans-terre et des sans-toit, les grèves et les mobilisations en défense du salaire, de l’emploi, de la terre, de l’éducation, de la santé et de meilleures conditions de vie en général ;

f.    ont été aux premiers rangs lors de la lutte contre la réforme de la Prévoyance vieillesse, lors des mobilisations et des grèves de la fonction publique, qui ont dénoncé le démantèlement de la Prévoyance vieillesse publique en faveur des fonds de pension privés ;

g.   n’acceptent pas que la victoire de 2002 aboutissent une fois de plus à une frustration du peuple brésilien ;

h.   défendent le socialisme, démocratique et respecteux des libertés.

B. Quelle analyse faisons-nous de la situation actuelle ?

a.   Nous n’acceptons pas le préalable selon lequel il n’existait pas une alternative à «l’héritage maudit» [des deux mandats présidentiels de Fernando Henrique Cardoso] et que l’unique solution était la poursuite du modèle néolibéral – refusé par le peuple dans les urnes –, y compris pour une période de transition. Nous pensons de la sorte, parce qu’il ne peut y avoir une transition vers un modèle démocratique de société lorsque les mesures appliquées sont basées sur un modèle monétariste orthodoxe et conservateur. Cette dynamique est confirmée par les affirmations du Ministre des Finances [Palocci] qui vise le maintien d’un excédant primaire budgétaire – le solde budgétaire avant le paiement du service de la dette - aux effets récessifs au cours des dix prochaines années.

b.   Nous n’acceptons pas que le gouvernement, dirigé majoritairement par des membres du Parti des travailleurs (PT), puisse présenter comme des grandes conquêtes – outre des indices financiers virtuels qui n’intéressent que les spéculateurs des «marchés» boursiers – deux modifications constitutionnelles absolument inacceptables. Cela sans considérer que les indices financiers virtuels en question constituent l’autre face de la tragédie que connaît l’économie réelle, notamment avec des taux de chômage record et une baisse des salaires. Quant aux deux modifications constitutionnelles, nous nous référons à la réforme de la Prévoyance vieillesse et à la réforme du régime des impôts, qui n’ont fait que remplir les exigences fixées par le FMI. Le gouvernement précédent, de Fernando Henrique Cardoso, aurait déjà pu mener à bien ces réformes si la fonction publique n’avait pas résisté, avec le soutien, alors, du PT.

c.   Nous considérons, par conséquent, que le gouvernement  de Lula est déterminé à assumer la tâche de la social-démocratie traditionnelle:  réaliser en collaboration avec les détenteurs du capital ce que la droite traditionnelle n’a pas la possibilité de réaliser, dans des conditions données.

d.   L’analyse que nous venons d’exposer nous amène à une conclusion: même s’il ne l’a pas fait de manière explicite, le PT a renoncé irrémédiablement à ses principes fondateurs. Actuellement, on peut déjà assister à des discussions en vue de la composition d’une plateforme électorale lors des municipales de [octobre] 2004 et des présidentielles de 2006, basée sur l’alliance gouvernementale  actuelle (PT, PMDB, PTB, PL). A ces forces politiques s’ajouteront celles qui voudront jouer au donnant-donnant des voix au Parlement. Y compris le Parti Populaire, de Paulo Maluf [un des dirigeants de la droite réactionnaire], revendique aujourd’hui des postes au plus haut niveau. Des partis comme le PC do B [parti communiste du Brésil, d'origine maoïste], le PSB et le PPS, avec quelques voix discordantes, finissent par accompagner et consolider le grand front de centre-droit. Ils laissent un espace vide qui ne peut évidemment pas rester inoccupé.

C. Ce que nous voulons ?

a.   Nous croyons dans la lutte des classes laborieuses, de la jeunesse et de la population pauvre en tant qu’instrument privilégié pour la conquête de l’emploi, du salaire, de la terre, de la santé, de l’éducation, pour la défense des droits des secteurs opprimés de la population et pour la défense de l’environnement, aujourd’hui menacés par les projets mis en place par le gouvernement.

b.   Nous ne pouvons pas nous résigner aux coups portés aux idées fondamentales du parti par la direction nationale du PT et par le gouvernement. Par conséquent, nous avons le droit – pour ne pas dire l’obligation – de construire une alternative politique, capable de prendre l’espace ainsi abandonné. Ce sera une alternative politique de lutte contre le modèle néolibéral et le gouvernement qui est train de l’appliquer et de défense des revendications et des valeurs des classes laborieuses. Cette alternative sera démocratique et plurielle, de masses et internationaliste, libérée de tous doctrinarismes et d’esprits de secte et fonctionnera sur la base de mécanismes qui garantissent la participation active des militant-e-s, sur la base du droit de tendances et d’un profond respect pour les minorités et pour le droit à l'expression d’opinions diverses. Ce mouvement est ouvert à toutes celles et tous ceux qui ont démissionné ou qui sont encore membres du PT ou d’autres partis, mais qui ne se laissent pas séduire par les trompettes des palais du pouvoir et qui défendent l’indépendance des salarié-e-s face à la bourgeoisie. A toutes celles et tous ceux qui sont conscients de l’incompatibilité absolue entre les réponses aux demandes de justice sociale et les limites données par le cadre du régime capitaliste. Enfin, à toutes celles et tous ceux qui se définissent de GAUCHE et qui s’identifient avec le SOCIALISME DEMOCRATIQUE en tant qu’objectif stratégique, de manière explicite et permanente.

c.   Nous défendons la construction d’une alternative avec toutes celles et tous ceux qui: n’acceptent pas la poursuite de la soumission du pays aux intérêts des banques et du FMI; qui rejettent l’Alca (Zone de libre-échange des Amériques), le paiement de la dette externe, l’autonomie de la Banque centrale, les détériorations des droits des salarié-e-s prévues dans la proposition de réforme de la législation sur le travail par le gouvernement de Lula ; qui rejettent la destruction des universités publiques prévue dans la réforme sur l’enseignement supérieur.

d.   Voilà ce que nous voulons construire à partir de la première rencontre. Ce sont uniquement quelques idées que nous voulons discuter avec des milliers de camarades afin de construire ensemble une nouvelle force politique au service du peuple brésilien. Nous croyons que seulement à partir de la discussion peut naître une force alternative. C’est à cette discussion que nous convoquons toutes celles et tous ceux qui croient qu’un autre monde est possible et nécessaire.

Rio de Janeiro, le 19 janvier 2004.

Heloísa Helena, sénatrice

Luciana Genro, Babá, João Fontes*, députés fédéraux

Agnaldo Fernandes – Socialismo e Liberdade

André Ferrari – SR

Carlos Nelson Coutinho

Cid Benjamin

Démerson Dias

Edílson Silva - Pólo Resistência Socialista

Elídio Marques – Movimento Esquerda Socialista (MES)

Francisco Affonso

Henrique Acker - Movimento Terra, Trabalho e Liberdade (MTL)

Iranilson Brasil,

Jadiel Messias dos Santos – Sintrasef 

Jefferson Moura – Movimento Terra, Trabalho e Liberdade (MTL)

Julieta Maria Buoro

Julio Camargo

Junia da Silva Gouvêa - Socialismo e Liberdade

Leandro Konder

Luiz Carlos Lucas

Marcelo Badaró

Marco Antonio Figueiredo - “nosso tempo é hoje”

Maria de Souza Lima

Marlene Moreira -, Assibge – SN

Martiniano Cavalcante – Movimento Terra, Trabalho e Liberdade (MTL)

Miguel Leme – SR

Miguel Malheiros – Corrente Socialiste dos Trabalhadores (CST)

Milton Temer

Ney Nunes - União Comunista

Nilo Sergio Aragão - “nosso tempo é hoje”

Pedro Fuentes – Movimento Esquerda Socialista (MES)

Reginaldo Schenermann - “nosso tempo é hoje”

Robério Paulino – Movimento Terra, Trabalho e Liberdade (MTL)

Roberto Leher

Roberto Morales – Movimento por uma tendência proletária (MTP)

Roberto Robaina – Movimento Esquerda Socialista (MES)

Ronaldo Alves

Rosangela Alves

Sandro Pimentel – Movimento Esquerda Socialista (MES)

Silaedson Juninho – Corrente Socialiste dos Trabalhadores (CST)

Tostão - Socialismo e Liberdade

Wellington Cabral - Corrente Socialiste dos Trabalhadores (CST)

 

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