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«Paix entre les peuples, guerre entre les classes»

Nous publions ci-dessous un article reproduit par Socialisme et Barbarie, l'organe du MAS (Mouvement vers le socialisme) d'Argentine. Il pose la question de l'accès à la mer pour la Bolivie. Plus généralement, cette question fait écho à un leitmotiv politique qui peut être utilisé en Amérique latine: l'excitation d'un sentiment nationaliste  contre un «autre pays latino-américain» avec comme objectif de resserrer  les «liens nationaux» et de construire des «pactes productifs nationaux», ayant pour fonction de dévoyer les processus de mobilisations anticapitalistes faisant avancer des éléments d'indépendance de classe. On voit cela, aujourd'hui en Uruguay, contre l'Argentine; alors que la perspective politique effective devrait se dessiner dans un champ régional, de confédération continentale socialis et et démocratique, pour consolider une émancipation face à l'impérialisme et contre les classes dominantes «locales». réd.

Cela fait un peu plus de trois mois qu'a eu lieu, le 17 octobre dernier, la chute de Sanchez de Losada. Trois mois au cours desquels a régné le calme en raison de la «trêve» observée par les principales organisations populaires du pays et en raison de l'important soutien apporté par les classes moyennes à Carlos Mesa-Gisbert.

Parmi ces facteurs, le plus important est l'appui apporté par Evo Morales au nouveau président. Morales, présenté par les Etats-Unis comme un gentil garçon, constitue sans doute aujourd'hui l'appui principal du gouvernement usurpateur.

Cependant, depuis quelques jours, ce «calme» commence à être menacé. Il y a quelques semaines, Mesa a parlé au pays et, contrairement à toutes les promesses antérieures qu'il avait faites, il a dit qu'il resterait jusqu'en 2007 «pour compléter le mandat de Sanchez de Losada». En même temps, la rumeur a commencé à se propager selon laquelle d'ici la fin du mois de janvier trois mesures très dures d'ajustement allaient être introduites: l'augmentation du prix du gaz et des carburants, ainsi que l'augmentation des  impôts sur le salaire [une sorte d'impôt dit indirect sur salaire à la source, comme celui appliqués au travailleurs saisonniers en Suisse] à partir d'un seuil très bas. Autrement dit, c'est une partie des mesures mêmes d'ajustement que Losada a tenté, sans succès, d'imposer.

Cette situation a commencé à provoquer l'inquiétude  de la part des dirigeants de la COB (Centrale ouvrière bolivienne) et de la CSUTCB (Centrale des travailleurs et des paysans) suivie de déclarations disant que «rien n'avait changé» et que «des actions allaient être entreprises dans les semaines à venir», dans la perspective de rompre avec la trêve gratuite et erronée que ceux-ci viennent d'observer depuis la chute de Goni (Sanchez de Lozada).

L'accès à la mer

C'est dans ce contexte  de pourrissement de la situation que Mesa, pas par hasard du tout, a commencé sa campagne sur l'accès à la mer pour la Bolivie. C'est une revendication juste, mais qui est utilisée pour déchaîner une furie nationaliste contre le peuple chilien, galvanisant ainsi le pays autour de Mesa.

C'est une tentative cynique de la part du gouvernement de lancer la balle dans l'autre camp, parce qu'évidemment, la faillite du pays n'est pas causée par le manque d'accès à la mer, mais bien par la politique appliquée au cours des 20 dernières années, politique que Mesa n'a pas changée; et par le fait que celui-ci a offert les principales ressources du pays aux entreprises multinationales impérialistes. Dans ce prétendu conflit avec le Chili, ce que l'on veut cacher, c'est le fait que le nouveau gouvernement continue à être au service des grands capitalistes et de l'impérialisme américain.

Ne pas se tromper d'ennemi

Ce n'est pas une nouveauté mais au contraire une constante historique que, dans des conditions révolutionnaires telles que celles dans lesquelles se trouve la Bolivie aujourd'hui, les gouvernements bourgeois essaient d'inventer une guerre pour parvenir à l'unité nationale interne des exploités et des exploiteurs contre un «ennemi extérieur».

Il ne s'agit en rien d'une guerre que Carlos Mesa aurait déclarée à l'impérialisme (dans ce cas, ce serait une guerre juste, une guerre de véritable émancipation nationale). Tout au contraire, l'on essaie de limiter le risque d'une nouvelle rébellion populaire contre le continuisme [de Lozada à Mesa] et contre la non-réponse apportée aux revendications du mois d'octobre 2003, en cherchant à orienter la population vers un affrontement avec un autre peuple opprimé, le peuple chilien.

Dans ce jeu sinistre – et très dangereux le dirigeant du MAS, Evo Morales, joue un rôle fondamental, en lançant malgré tout une campagne de boycott des produits chiliens (de la même manière – lamentablement - que les Comités de quartier de Ela Alto).

Il ne s'agit pas bien sûr de défendre la bourgeoisie chilienne et son gouvernement, ni de nier la légitimité de l'aspiration bolivienne à avoir un accès vers la mer. Mais de dire qu'en impulsant la guerre et la haine entre deux peuples opprimés, entre les Boliviens et les Chiliens, Morales se démasque, en révélant sa politique d'appui permanent à Mesa, la continuité qui va régner jusqu'en 2007 et le fait que son seul objectif est de gagner les élections cette année.

D'autre part, ces manœuvres finissent souvent par avoir l'effet opposé à celui qui était escompté en déchaînant, avec plus de force encore, le processus de lutte. En effet, par leur propre expérience, les masses exploitées et opprimées finissent par se fatiguer de ces affrontements et par comprendre que leur ennemi ce n'est pas le peuple opprimé de l'autre pays, mais au contraire ses propres exploiteurs et l'impérialisme.

C'est la position que les directions et organisations indépendantes en Bolivie doivent défendre. Il s'agit de ne pas céder à la marée faussement nationaliste (en étant contre l'agression militaire chilienne de 18791 et pas contre le saccage impérialiste actuel!) et de se maintenir fermement sur la position consistant à ne faire aucune confiance à Mesa et à ne lui donner aucun appui.

Tout au contraire, le chemin passe par le renforcement et le développement d'organisations indépendantes de la classe ouvrière, des paysans, des indigènes ainsi que de tout le peuple bolivien (Voir sur ce site l'article sur la Bolivie, en date du 30 janvier 2003)

CONGRES DES JEUNES A EL ALTO

Les 23, 24 et 25 du mois de janvier s'est déroulé à El Alto un Congrès National des organisations de jeunes. Ce Congrès a une importance particulière au vu du rôle que les jeunes ont joué, et particulièrement ceux de El Alto, dans les journées révolutionnaires d'octobre. De plus, cela peut constituer un pas en avant afin qu'un secteur important des exploités et opprimés de Bolivie commence à s'organiser. Nous sommes fiers d'informer nos lecteurs que nous sommes invités au Congrès en tant qu' «organisation fraternelle», et que nous accepterons cette invitation en nous faisant accompagner là-bas par des camarades de Socialisme ou Barbarieet du MAS (Mouvement vers le socialisme) d'Argentine. 20 janvier 2004

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1. Entre 1879 et 1883, une guerre s'est déroulée entre le Chili et la Bolivie. Elle a abouti à ce que la Bolivie, alliée au Pérou, soit battue et doivent céder Atacama (120'000 km2) qui est actuellement dans la province chilienne d'Antofogasta. Cette défaîte a fait perdre l'accès à la mer à la Bolivie.