Haïti-République dominicaine

Les douceurs de l’esclavage au paradis dominicain

Franck Seguy *

Une vidéo fait la une des forums haïtiens depuis le début du mois de mai 2009. Elle montre une foule de Dominicains rassemblés dans le quartier Buenos Aires de Herrera, à Santo-Domingo en République dominicaine, spécialement pour assister à ce qui semble être une corrida. Le taureau? Un des nombreux esclaves Haïtiens vivant en République dominicaine. Le toréador? Un Dominicain musclé muni d’une hache. D’un seul coup de hache, la tête du Haïtien, Carlos Merilus, est tranchée. Et le délire s’empare de la foule. Les enfants immortalisent le moment en gravant des photos à l’aide de leurs appareils cellulaires. Les adultes applaudissent. L’extase atteint son comble. On dirait que la République dominicaine vient de remporter une coupe du monde.

Fin 2008, un de mes amis vivant en République dominicaine m’avait envoyé des images vidéo montrant un Dominicain coupant la main à un Haïtien avec une machette, après l’avoir forcé celui-ci à se déshabiller totalement. Puis, l’ayant contraint à étendre sa main sur une pierre, servant d’autel pour le sacrifice, le Dominicain tranche la main d’un seul coup de machette. Une scène définitivement ordinaire en République dominicaine!

J’avais moi-même posté cette vidéo sur un forum haïtien très fréquenté, avec un objectif précis: tester le degré de cynisme et de perversion des classes dominantes haïtiennes et leurs abominables capacités à manipuler les classes dominées-exploitées. J’en ai eu pour mon compte. Les médias bourgeois – il n’y en a pas d’autres en Haïti, actuellement – se sont voués à une course effrénée d’émissions libres-tribunes et d’«analyses», exactement pour éviter qu’on ne cherche les racines du problème. Et comme d’habitude, après quelques émissions de défoulement, tout est rentré dans l’ordre – le même. L’objectif était atteint!

La vidéo montrant la décapitation de l’esclave haïtien en terre voisine, le samedi 2 mai 2009, suscite beaucoup d’émoi. Nos professionnels libéraux, missionnaires d’ONGs, cadres d’administration et de commerce, professionnels de communication ... petits-bourgeois en cravates et cols blancs, généralement désignés par le concept flou de classes moyennes, se montrent on ne peut plus choqués. Parce que des centaines de milliers de Haïtiens sont réduites – et tués – en esclavage? Oh! Non. Mais parce que cette mort spectaculaire risque de ternir leur image à l’étranger.

Aucune société (voire aucun individu) n’a jamais réussi à résoudre un problème qu’elle ne se pose pas ou qu’elle pose mal. De sorte que, si l’on envisage la condition esclave des centaines de milliers de Haïtiens exploités-opprimés en République dominicaine comme un problème, l’on n’a pas d’autres choix que d’analyser cette condition d’abord en la prenant par ses racines, puis en cherchant les différentes ramifications qui en font un arbre au tronc assez épineux et coriace.

Un ensemble de faits intrinsèquement reliés les uns aux autres doivent ainsi être pris en considération par celle ou celui qui souhaite faire mieux que pleurer. Qui veut comprendre.

Brèves considérations historiques

C’est connu que les Haïtiens représentent le seul peuple des temps dits modernes à descendre directement et exclusivement d’un troupeau d’anciens esclaves qui se sont rebellés. Par respect pour le bon sens, on ne devrait pas parler d’esclaves, mais de captifs qui se sont rebellés – car l’esclave est par définition un soumis. Étant sortie des entrailles de l’esclavage et du colonialisme, Haïti s’en ressent nécessairement. Cependant, il faut comprendre que ceci n’est pas qu’un poids de l’héritage: il s’agit d’un choix qui a réussi à s’imposer entre plusieurs possibles.

Dessalines, leader principal de la Révolution qui a conduit à l’Indépendance en 1804, entendait partager les richesses selon le principe communiste «à chacun selon ses besoins». Sa phrase revendicative: «Et les pauvres nègres dont les pères sont en Afrique, n’auront-ils donc rien?» est passée à la postérité. Cependant, on évite de mettre en exergue le fait que celle-ci constituait la réplique à l’interrogation des généraux et autres grandons (grands propriétaires terriens) stipulant: «N’est-il pas constant qu’après avoir joui depuis 10, 20 et 30 ans d’un bien on devait en être supposé le véritable propriétaire?» (Thomas Madiou, Histoire d’Haïti, t. 3, Ed. Deschamps, 1989, p. 391).

L’analyse de ces deux positions révèle toute la nature irréconciliable des contradictions sur lesquelles devait s’édifier le nouvel Etat indépendant. D’un côté, Dessalines et toute la masse des anciens cultivateurs se demandaient: «Quelle récompense accordée à ceux qui, par leur héroïsme, avaient rétabli l’empire de la Liberté (...) si les anciens oppresseurs, maîtres de toutes les grandes et riches propriétés, continuaient à en jouir paisiblement? On se demandait en outre à qui du reste appartenaient ces terres? N’était-ce pas à ceux qui pendant deux siècles les avaient cultivées, qui n’en avaient jamais joui et qui n’avaient subi que les traitements les plus barbares pour prix de leur sueur? (Madiou, p. 141) ”

Pour empêcher que la question ne soit réglée selon ce principe, «ceux des généraux de l’Empire d’Haïti qui n’avaient pris les armes contre les Français que pour jouir, après le triomphe de la cause sainte de la Liberté, des droits politiques les plus larges, ourdiront sa perte [de Dessalines], inciteront à l’insurrection les masses devenues mécontentes…(p.140)».

La masse des cultivateurs avait pris les armes pour établir l’empire de la Liberté qui, à leurs yeux, signifiait le bien-être collectif pour tous, principalement pour celles et ceux qui avaient subi les traitements les plus barbares pendant deux siècles de sueur et de sang. Les généraux et autres grandons avaient aussi pris les armes contre les Français, mais seulement pour les chasser et prendre leur place. Afin de jouir en seuls maîtres et souverains. C’est donc sur une constante capitaliste-esclavagiste reconnaissant le droit de propriété seulement à ceux-là qui avaient déjà été propriétaires durant l’époque coloniale-esclavagiste que ces derniers ont construit l’Haïti indépendante.

Deux ontologies de l’être social radicalement antagoniques croisent ici les fers. Celle de Dessalines et de la masse des paysans, qui voulaient la fin de l’oppression et le partage équitable, a baissé la tête devant celle des généraux et grandons qui n’entendaient que chasser les anciens oppresseurs, laissant intacte le système oppressif. Il en résulte le refoulement des paysans-cultivateurs vers les mornes (terres montagneuses) souvent arides et desséchées. Toute la production développée par ces misérables sera captée par les bourgeois-grandons des villes qui en avaient besoin pour, entre autres, payer l’indue – faussement appelée dette – ­de l’indépendance.

Le reste est connu. De 1804 à 1920, les caisses de l’Etat grandonarcho-bourgeois haïtien se sont remplies exclusivement de la sueur et du sang des paysans-cultivateurs. Il a fallu la première occupation étasunienne de 1915 pour initier les grandons-bourgeois haïtiens au pénible exercice de contribuer aux caisses de leur Etat. Toute la castration opérée dans les veines des cultivateurs a servi d’abord à payer à la France son autorisation pour que le peuple haïtien vive. A cette indue, on a octroyé le joli nom de dette d’indépendance.

Une autre partie de revenus est employée dans des dépenses ostentatoires. Une autre partie encore est directement volée et placée dans les grandes banques européennes. La réserve a été emportée par les occupants yankees qui avaient ouvertement, et au grand jour, dévalisé la banque centrale.

Ainsi, on comprend aisément que les centaines de milliers de Haïtiens en esclavages dans les grandes plantations sucrières dominicaines soient essentiellement des paysans et des travailleurs agricoles. Ils sont également employés par l’industrie de la construction. Il est passé en proverbe en Haïti que «le travail de la terre ne récompense pas». C’est pourquoi, tout cultivateur haïtien sait qu’il doit se trouver une autre activité s’il ne souhaite pas croupir dans la plus crasse des misères.

Mais ceci n’est qu’un aspect de la question. La question fondamentale réside dans la possession même des terres. Elles sont la propriété de bourgeois habitant les villes: les grandons-bourgeois. Ceux-ci ne les exploitent pas selon la pure rationalité capitaliste qui consisterait à y pratiquer une agriculture à grande échelle.

Non! Ils les morcellent pour mieux les confier à des paysans qui se chargent de les faire fructifier selon le principe des deux moitiés (demwatye). La perfidie de ce principe permet que, dans tous les coups et les cas, le grandon-bourgeois sort gagnant. Tandis que le paysan ne gagne jamais. Car en ayant reçu une parcelle de terre à travailler, il lui revient la charge de tout le travail: préparation du sol, semence, organisation du travail, main-d'œuvre...

Pourtant à la récolte, il doit appeler le propriétaire qui a officiellement droit à la moitié mais qui parfois enlève les trois-quarts. Il en résulte assez souvent que la part qui revient au paysan ne couvre même pas les nombreuses dépenses auxquelles il avait consenti pour réaliser la production.

Le rapport de ce cultivateur avec cette terre et la culture qu’il y pratique relève donc de la plus pure chosification. On entend par là le fait que ce cultivateur ainsi que la terre qu’il travaille ne représente ni plus ni moins que des moyens pour le grandon-bourgeois d’accroître ses richesses. De sorte que le travail, élément universel de socialisation de l’humanité, a été perverti par l’impératif de l’activité productive capitaliste de type grandonarcho-bourgeois qui est la loi absolue en Haïti. Le résultat se vérifie dans la dévastation de notre écologie, dans l’historique phénomène d’exode rural vers Panama (pour la construction du canal, initié en 1880 par la France, puis interrompue, puis terminée par les Etats-Unis), vers les plantations sucrières étasuniennes à Cuba (fin 19e siècle et première moitié du 20e) et vers la République dominicaine (les bateys, ou la formule d’exploitation peut se résumer par l’équation la «meilleure» suivante: 15 heures de travail par jour = une tonne de canne =1 euro par jour).

Racisme-capitalisme à la dominicaine

En 1937, la bourgeoisie dominicaine avait déjà organisé le massacre de plus de 50 mille travailleurs Haïtiens, avec la complicité de la bourgeoisie haïtienne. Car le racisme dominicain alimente constamment cette crainte que la présence haïtienne ne se fasse quantitativement trop significative en République dominicaine.

Cette présence est actuellement estimée à 800’000 Haïtiennes et Haïtiens. Plus de 50’000 seraient des étudiants. La constitution haïtienne stipule clairement: «L’Etat doit financer le fonctionnement et le développement de l’université d’Etat d’Haïti et des écoles supérieures publiques. Leur organisation et leur localisation doivent être envisagées dans une perspective de développement régional (art. 209)». L’argent des travailleurs haïtiens est utilisé de préférence pour alimenter les caisses du FMI: Fonds de la misère, pardon monétaire, internationale. Et l’Haïtien, au lieu d’exiger le développement de sa propre université, préfère se faire saigner à blanc hors de ses frontières.

Cet exode rural susmentionné, résultat des relations sociales grandonarcho-bourgeoises, ne se fait pas que vers l’extérieur. Il répercute avant tout sur les villes. Cette urbanisation n’étant pas planifiée, les centres urbains se métamorphosent en de vastes bidonvilles. L’une de ses conséquences réside dans cette armée de travailleurs de réserve qui nous vaut notre réputation de «main-d'œuvre bon marché».

Cette main-d'œuvre à bon marché est exploitée depuis maintenant un siècle en terre voisine. Les données fournies par le Groupe d’appui aux réfugiés et rapatriés (Garr) font remarquer que 90% de la main-d'œuvre agricole dominicaine est constituée de travailleurs haïtiens (garr-haiti.org).

Il ne sera pas superflu de rappeler que ce processus a débuté quand, en 1915-1916, les occupants yankees avaient décidé d’installer leurs usines sucrières en République dominicaine, considérant que la partie Est de l’Île d’Haïti offre de meilleures conditions au développement d’une telle activité. Mais, pour l’entretenir, ils avaient décidé que la main-d'œuvre haïtienne était à la fois plus rentable et moins coûteuse. La fin de l’occupation en 1934 n’a pas mis fin au processus. Durant la deuxième moitié du 20e siècle jusqu’à la chute de la dictature des Duvalier en 1986, l’Etat haïtien s’était engagé par accord écrit avec l’Etat dominicain à lui fournir les travailleurs dont sa bourgeoisie a besoin pour entretenir ses plantations agricoles. Déjà en 1980, l’OIT (Organisation internationale du travail) avait reconnu que la seule expression propre à traduire la situation de ces travailleurs haïtiens en République dominicaine était celle d’«esclavage moderne».

Quelques décennies après le grand massacre de 1937, après que les Etats-Unis d’Amérique du Nord ont procédé à la castration de l’économie paysanne en détruisant systématiquement son cheptel porcin, on a vu avec quel dévouement la bourgeoisie haïtienne et ses administrateurs dans l’Etat avaient reconstruit leur richesse à titre de courtiers dans l’embauchage de travailleurs Haïtiens en direction les plantations de canne à sucre dominicaines. Ils peuvent toujours verser quelques larmes et pas mal de baves du haut de leur état de crocodiles. N’empêchent qu’ils sont les premiers bourreaux à avoir fait voler en  éclat la tête de Carlos Merilus.

La fin de la dictature en 1986 n’a mis fin qu’officiellement à cet accord. Car les industriels dominicains maintiennent des contrats avec des passeurs qui sont chargés d’aller chercher des Haïtiens dans les montagnes pour les amener sur les plantations de cannes. Ces passeurs sont connus sont le nom de buscones (du verbe espagnol buscar = chercher).

Faut-il rappeler que le trafic d’êtres humains s’est imposé, à côté du trafic de la drogue et des armes, comme le plus rentable à l’heure du patriarcat-capitalisme-racisme globalisant actuel?

Le trafic de travailleurs Haïtiens et de travailleuses Haïtiennes est une entreprise sciemment organisée. Il implique au moins: les soldats dominicains chargés de la surveillance de la frontière dominicaine, les propriétaires des usines sucrières et des grandes plantations de cannes-à-sucre, les agents de la migration, et d’autres secteurs non moins importants des deux côtés de la frontière.

Le travailleur – la travailleuse – est soudoyé par le buscone qui lui fait miroiter monts et merveilles. Ainsi, le buscone réussit à soutirer de l’argent de la part du travailleur-de la travailleuse en échange du passage de la frontière. En réalité, le buscone s’arrange pour abandonner sa proie en pleine route, dans un endroit où il est sûr que celle-ci sera capturée par les gardes frontaliers. Ces derniers, pour autoriser la travailleuse ou le travailleur sans défense et sans papiers à continuer sa route, exigent la satisfaction de tous leurs caprices. Le cas de Jeannot Succès, assassiné par les soldats frontaliers dominicains, est très connu. Jeannot Succès, ayant déjà payé au buscone son droit de passage, a refusé de verser de l’argent aux gardes quand il a été capturé. Ces derniers l’ont battu jusqu’à la mort. En hommage à ce travailleur rebelle, un réseau qui travaille sur les droits humains des Haïtiens expulsés de force par l’Etat dominicain porte le nom Jeannot Succès.

Il ne sera peut-être pas superflu non plus de mentionner que chaque année, selon les données du Garr, au moins 20’000 Haïtiens sont rapatriés de force vers Haïti par l’Etat dominicain. Ce rapatriement se fait généralement au moment du payroll (de la paie). Les capitalistes dominicains, non contents d’exploiter pour une pitance la main-d'œuvre haïtienne, utilise d’autres subterfuges pour ne rien payer. Ainsi, à l’heure de payer, ils appellent la police à laquelle ils feignent de dénoncer la présence d’illégaux dans tel ou tel endroit. Et la police de capturer toute personne de peau noire rencontrée sur les lieux.

Inutile de dire que des travailleurs dominicains sont aussi victimes de cette chasse organisée sur la base de la couleur de la peau. Celle-ci ne se pratique pas uniquement sur les lieux de travail. Les personnes sont souvent capturées dans leur domicile même, à n’importe quelle heure du jour...ou de la nuit. Et déportées, sans préavis, vers Haïti. Beaucoup d’entre elles, arrivées en Haïti ne savent pas où aller, puisqu’elles ne sont pas nées en Haïti et n’y sont jamais venues auparavant.

Quelques considérations sur l’actualité

Actuellement, il existe en Haïti une vaste main-d'œuvre qui ne demande qu’à être exploitée. Paradoxe! Le problème est qu’à l’image de toutes les sociétés capitalistes, le capitalisme haïtien aussi n’est même pas en mesure d’exploiter directement l’ensemble des travailleurs. Comme on le sait, cela ne dégrade pas que les conditions de vie des sans-emploi. Les conditions de survie des salariés aussi sont rythmées par une précarisation des plus effroyables. Il suffit de remarquer que le prix d’une journée de travail ouvrier jusqu’à ce mois de mai est de 70 gourdes (1 dollar = 41 gourdes). En 1986, il était de 3 dollars.

Depuis mars 2007, un député avait pris l’initiative d’introduire par-devant ses collègues une proposition de loi en vue d’ajuster le salaire minimum. Il y a seulement une semaine, le 5 mai 2209, cette proposition a été adoptée par vote, ajustant ainsi le salaire minimum à 200 gourdes (c’est-à-dire moins de 4 euros; 1 euro=53.50 gourdes). Inutile de dire que ces 26 mois ont été employés par les organisations patronales pour exercer leur pression à la fois sur le législatif et l’exécutif afin de bloquer ce vote. De sorte que les organisations des travailleurs attendent encore avec vigilance que le président de la République ordonne (puisque c’est à lui qu’incombe cette obligation) la promulgation de ladite loi au journal officiel. Mais, déjà, des patrons font menace sur leurs ouvriers pour que ces derniers acceptent de recevoir seulement 160 gourdes.

Il y a donc lieu de remarquer que quand le travailleur haïtien va se faire trancher la tête en République dominicaine, il ne fait que choisir entre deux morts brutales. Car, en 2009, on ne connaît aucun pays où un père ou une mère de famille peut répondre aux besoins des siens avec 3,73 euros (4,87 dollars). Dans ce cas, le travailleur sait déjà que le patronat haïtien n’offre que la mort. Tandis que, mal informés, il imagine que l’herbe pourrait être verte du côté de l’enclos voisin. Aussi n’hésite-t-il pas à migrer, sans papier ,vers la République dominicaine, où, comme on vient de le voir, il ne jouira d’aucun droit.

L’assassinat crapuleux de Carlos Merilus n’a servi que la Préval cause de l’état dominicain. Son ambassadeur en Haïti devient une vedette dans la presse haïtienne. Il est l’invité d’émissions radiophoniques à émissions. Il prononce même une conférence de presse au Ministère haïtien des affaires étrangères. Des positions diplomatiques de condamnation. Mais des deux côtés, les deux états n’iront pas plus loin.

René Préval lui-même {président entré en fonction en mai 2006) est, on ne peut plus clair là-dessus: il n’y a pas de violation des droits humains de Haïtiens en République dominicaine. On n’a pas manqué de se plaindre de cette déclaration du chef de l’état qualifié d’irresponsable.

Mais il paraît que personne n’a encore relevé le vrai sens de la déclaration du président haïtien: les Haïtiens qui sont assassinés en République dominicaine n’ont pas de droits. D’ailleurs, la plupart n’ont même pas un certificat de naissance. On ne peut pas se faire voler ce qu’on n’a pas.

Le gouvernement dominicain, moins cynique que l’actuel gouvernement haïtien, a rapidement promis justice pour le crime de Carlos Merilus. L’unique justice que nous autres, travailleurs, pouvons espérer est la nôtre, celle qui détruira le capitalisme. Tant que nous n’aurons pas construit cette victoire révolutionnaire qui mettra fin à la domination-exploitation du patriarcat-racisme-capitalisme partout où elle s’établit, nous continuerons d’être humiliés pour des temps encore plus longs.

* Frank Séguy est un sociologue haïtien.

(13 mai 2009)


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