France «Ce que veulent les Français après le 29 janvier» Yves Housson * Le 29 janvier 2009 ne doit pas rester sans lendemain. Interrogés vendredi 30 janvier juste après la journée d’action interprofessionnelle, les Français ont en quelque sorte fixé leur feuille de route aux syndicats: à 61%, ils souhaitent que les organisations des salariés «appellent à poursuivre la mobilisation», selon un sondage CSA/L’Humanité. Sans surprise, mais de façon tout de même très significative, une majorité écrasante de sympathisants de gauche (84%) partagent cette attente. Finalement, les Français sont «assez cohérents» avec eux-mêmes, note Jean-Daniel Lévy, de l’institut CSA: avant le 29 janvier, ils avaient exprimé un fort soutien à la mobilisation, «à un niveau supérieur à ce qui est habituellement enregistré» pour ce type d’événement ; après, ils veulent toujours «faire passer le message»: que leurs attentes sociales, en matière de pouvoir d’achat, d’emploi,etc., «soient bien prises en compte». Mouvement durable Loin d’une brusque éruption de fièvre, tout semble indiquer que nous en sommes aux débuts d’un mouvement durable. L’envie de voir les syndicats prolonger l’action est d’autant plus marquée qu’aux yeux de nos concitoyens le plan gouvernemental de «relance» «ne semble pas produire les effets qu’ils en attendent», observe Jean-Daniel Lévy. Second grand enseignement de notre sondage: Nicolas Sarkozy et son gouvernement, en dépit de leurs efforts massifs de «communication», ne convainquent pas. Depuis jeudi, on l’a vu, le chef de l’État et son équipe ministérielle s’emploient à réduire la mobilisation enclenchée à une simple «manifestation d’inquiétude», sans remise en cause de leur politique, et en se contentant de promettre une vague concertation. Près de 6 Français sur 10 se disent «pas satisfaits» de cette attitude face au 29 janvier. Le taux atteint les 83% chez les sympathisants de gauche, et le courant n’épargne pas les électeurs du centre et de la droite: 71% des sondés proches du Modem [parti dirigé par François Bayrou] et près d’un quart des sympathisants de l’UMP (24%) se déclarent aussi insatisfaits. Gouvernement désavoué Quant à la politique économique du gouvernement, alors que l’équipe Sarkozy-Fillon va répétant qu’elle est la seule thérapie possible, qu’il s’agirait seulement, en somme, d’avoir la patience d’attendre qu’elle produise ses fruits, une nette majorité de sondés (62%) considèrent au contraire qu’elle ne «permettra» pas de «lutter efficacement contre la crise». La défiance atteint ses plus hauts niveaux chez les chômeurs (81%), les salariés du secteur public (77%), les étudiants (73%). Seules 4% des personnes interrogées trouvent les choix du gouvernement «très efficaces» et 23% «plutôt efficaces». Si les Français «n’ont pas un plan bis», «avec une revendication clairement exprimée», ils n’en attendent pas moins «une réorientation de la politique suivie», analyse Jean-Daniel Lévy, de CSA. Au total, cette enquête a bel et bien valeur de désaveu pour un premier ministre qui, hier encore, droit dans ses bottes, prétendait écarter toute idée de «changement de cap». * Ce sondage a été publié dans L’Humanité du 3 février 2009. Ce sondage exclusif CSA / L’HUMANITE a été réalisé par téléphone le 30 janvier 2009 au domicile des personnes interrogées. Echantillon national représentatif de 1002 personnes âgées de 18 ans et plus, constitué d’après la méthode des quotas (sexe, âge, profession du chef de ménage), après stratification par région et catégorie d’agglomération. (3 février 2009) A l'encontre, case postale 120, 1000 Lausanne 20 Soutien: ccp 10-25669-5 |
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