Colombie-Suisse Des syndicalistes colombiens menacés de mort par les paramilitaires Rédaction Dans un tract diffusé le matin du 22 septembre 2010, des syndicalistes du syndicat de l'alimentaire Sinaltrainal et leurs familles sont menacés de mort. Voici la traduction du texte distribué dans les rues de la ville de Bugalagrande [municipalité située dans le Département de Valle del Cauca]. Le style du texte révèle, à la fois, la brutalité des brutes assassines et les méthodes d’intimidation. Ces dernières sont prises fort au sérieux car de l’intimidation à l’acte criminel l’espace est celui d’une feuille de cigarette (réd.) ***** Les Aguilas Negras [Aigles Noirs] informent: 1. Le front de guerre occidental commence ses opérations d'épuration dans le Département de Valle [de Cauca]. 2. Les Aguilas Negras répondent ainsi aux tracts et activités des fils de pute de la guérilla, des syndicalistes, des gauchistes du Polo democratico et de tous les fumeurs de marijuana et malfaiteurs. 3. Nous voulons aussi donner une réponse à tous ces fils de pute de guérilleros qui se cachent dans Sinaltrainal et aux ouvriers qui travaillent chez Nestlé et à d'autres qui ont abandonné, ils sont en ligne de mire et nous savons où ils se trouvent. 4. Notre objectif est d'exterminer cette organisation et ses dirigeants et ex-dirigeants avec leurs familles. 5. Extermination pour JAVIER CORREA, EDGAR PAEZ, FABIO OLAYA, JAIRO MENDEZ, RAFAEL ESQUIVEL, MARTIN AGUDELO ET D'AUTRES (FILS DE PUTE DE L'ELN). 6. NOUS LEUR DONNONS LA POSSIBILITE DE S'EN ALLER DE LA VILLE DANS LES QUINZE JOURS POUR QUE CES FILS DE PUTE DISPARAISSENT. BLOC OCCIDENTAL DES AGUILAS NEGRAS, SEPTEMBRE 2010 ***** L'une des personnes ainsi menacées est Edgar Paez, secrétaire de Sinaltrainal chargé des relations internationales, qui a donné de nombreuses conférences en Europe pour parler de la situation difficile des syndicalistes colombiens. La Colombie est, depuis longtemps, le pays qui compte le plus grand nombre de syndicalistes assassinés. Ils sont en particulier menacés dès qu'ils luttent avec détermination contre la dégradation des droits des travailleurs·euses, mettant en cause la politique des multinationales dans ce pays et présentant des alternatives. Lors de ses visites en Europe, Edgar Paez a ainsi évoqué les luttes menées chez Coca-Cola et Nestlé, décrivant comment ces conflits ont coûté la vie à plusieurs de ses collègues syndicalistes. Il y a cinq ans… L'une des victimes est Luciano Romero, enlevé le 23 septembre 2005, il y a cinq ans, par le «Bloc Nord» des paramilitaires, pour être torturé puis assassiné. Nestlé l'avait licencié en l'accusant d'avoir participé à une grève, qui en réalité n'a jamais eu lieu. Ce qu'il avait fait, c'était de critiquer la présence des paramilitaires dans la région, et de dénoncer les violations du droit du travail commises par Nestlé. Pour expliquer la mort de Luciano Romero, les histoires les plus absurdes ont été avancées: il aurait été tué lors d'un vol de voiture, ou alors lors d'un crime dit passionnel commis par jalousie, ou encore pour mettre la main sur son assurance vie – qu'il n'a d'ailleurs jamais eue. Les paramilitaires responsables de l'assassinat ont cependant été arrêtés. La procédure en justice contre les assassins de Luciano Romero a aussi donné lieu à des enquêtes contre les responsables de Nestlé, qui n'ont pas encore abouti à ce jour – alors que le chef paramilitaire Salvatore Mancuso a déclaré, dans le cadre de sa déposition en date du 17 mai 2007, que les paramilitaires des Autodéfenses Unies de Colombie (AUC) étaient financées par diverses entreprises, notamment par Cicolac (Nestlé). Le cas de Luciano Romero montre que les récentes menaces proférées par cette bande d'assassins paramilitaires doivent être prises au sérieux. Elles sont une réaction à la journée d'action du 17 septembre 2010, organisée par le syndicat Sinaltrainal en mémoire de Luciano Romero sur l'ensemble des sites de production Nestlé. Les tracts syndicaux distribués à cette occasion exigeaient que toute la lumière soit faite sur cet assassinat perpétré il y a cinq ans, et notamment aussi sur ses instigateurs restés dans l'ombre. Le jour même, puis le 20 septembre, les bureaux du syndicat de la ville de Bugalagrande ont reçu plusieurs visites de personnages suspects, qui se sont à chaque fois retirés – certains parmi les syndicalistes menacés bénéficient en effet d'un service de garde du corps sur ordre de la commission interaméricaine des droits humains. Sinaltrainal vous demande votre aide ! Ecrivez à: Nestlé Europe: Angelino Garzón Hernán Jaime Ulloa Venegas Sinaltrainal
(5 octobre 2010) A l'encontre, case postale 120, 1000 Lausanne 20 Soutien: ccp 10-25669-5 |
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