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Manifestation des services publics 15/12/1999



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    Le mérite, aujourd’hui:
    défendre nos droits toutes et tous ensemble, privé et public !

La manifestation de ce soir s’inscrit, bien sûr, dans la série de mobilisations, de manifestations et de grèves organisées depuis des années par les salarié·e·s de la fonction publique du canton de Vaud pour s’opposer à la détérioration de leurs conditions de travail et à la remise en cause, progressive, de la qualité des services publics garantis aux usagers.

Des salarié·e·s qui disent NON

Cependant, cette année, le contexte est différent. Cette mobilisation n’est plus isolée.

  • Depuis des semaines, les travailleurs de la construction se battent pour obtenir 200 fr. d’augmentation de salaires et pour faire barrage à une flexibilité encore plus grande des horaires.
  • En octobre, les salarié·e·s des arts graphiques ont débrayé pour exiger un meilleur contrat collectif de travail (CCT).
  • A Neuchâtel, toute la fonction publique a fait grève une nouvelle fois, le 6 décembre, pour s’opposer au salaire au mérite.
  • Plus de 16 000 fonctionnaires du canton d’Argovie se sont mis en grève, fin novembre, pour bloquer une baisse de leurs salaires.
  • Au Valais comme à Zurich, le personnel soignant est massivement descendu dans la rue pour revendiquer de fortes hausses de salaire et pour dénoncer la surcharge de travail.
  • A Genève, depuis des semaines, les habitant·e·s d’un quartier, celui de Saint-Jean, se battent contre la fermeture de leur bureau de Poste, une mesure annonciatrice du démantèlement que la direction de feu la régie fédérale veut imposer dans toute la Suisse (les offices postaux seront réduits de deux tiers à Lausanne !).

Le mérite du « salaire au mérite »:
augmenter la concurrence, casser les solidarités

Depuis des mois, la presse répète la « bonne nouvelle » : la « reprise » est là, l’« économie » va mieux, les soucis peuvent s’éloigner.
Ce que vivent les salarié·e·s est différent. Les multiples actions menées cet automne en témoignent :

  • Le chômage effectif, en Suisse comme en Europe, ne recule que très lentement. Par contre, les autorités ont inventé des catégories statistiques – les « demandeur·e·s d’emploi », en Suisse – qui permettent de dissimuler des pans entiers du chômage. Aujourd’hui, en Suisse, il y a presque deux fois plus de demandeurs d’emplois que de chômeurs officiels. Sans parler de la précarité qui progresse : emplois temporaires, etc.
  • Les yeux rivés sur leurs taux de profit – ils veulent du 15 % ou du 20 % – et sur leurs cours en Bourse, les plus grands groupes – Sulzer, ADtranz, Novartis, etc. – continuent à sabrer dans les emplois, directement, et indirectement chez des dizaines de sous-traitants.
  • Aujourd’hui comme hier, il n’existe en Suisse pas la moindre protection contre les licenciements : les employeurs peuvent organiser leurs charrettes selon leur bon vouloir, au moindre coût. Quant à celles et à ceux qui conservent leur emploi ou qui en retrouvent un, ils et elles subissent une pression croissante : toujours plus de flexibilité, des horaires en accordéon, pas une seconde de répit au travail.
  • Alors que les profits des entreprises et les dividendes des actionnaires s’envolent, les salaires, eux, restent collés au plancher. Jamais depuis des décennies, la part des salaires dans la richesse sociale produite chaque année n’a été aussi faible, en Suisse comme en Europe.
  • Pour une grande partie des salarié·e·s, la décennie nonante a été celle d’une baisse du pouvoir d’achat (encore plus importante si l’on tient compte de l’explosion des primes de l’assurance maladie, pas intégrées dans l’indice officiel des prix à la consommation !).
  • Les employeurs veulent désormais casser le salaire en tant que droit garanti à une rémunération déterminée, pour un travail donné. Ils veulent le remplacer par un système à trois piliers : un salaire de base, une gratification liée aux « performances » de l’entreprise et une prime liée au « mérite » individuel.
    Comme ils ont déjà « assoupli » le temps de travail – c’est-à-dire imposé de nouvelles contraintes aux salarié·e·s, dont les horaires sont sans cesse bousculés – les employeurs veulent maintenant « flexibiliser » les salaires.
    Le seul mérite de ce changement sera d’augmenter le pouvoir arbitraire des employeurs et de leurs chefs, d’augmenter la concurrence entre salarié·e·s et de les diviser (entre entreprises, au sein d’une même entreprise).

Le contenu de la « modernisation » : une régression sociale

Voilà le modèle qui inspire les politiciens de droite, les milieux patronaux, les technocrates (et quelques sociaux-démocrates) qui clament aujourd’hui qu’il est indispensable de « moderniser » la fonction publique. Et, pour cela, de supprimer le statut de fonctionnaire, au niveau cantonal comme au niveau fédéral.

  • Cette prétendue « modernisation » de la fonction publique n’a rien à voir avec ce que pourrait – et devrait – être une vraie réinvention et démocratisation des services publics en cette fin de siècle : définir ensemble, salarié·e·s et usager·e·s, (1) la palette des biens et des services (éducation, santé, etc.) rendus universellement accessibles, indépendamment du pouvoir d’achat de chacun, par ce qui s’appelle – justement ! – le « service public » ; (2) les conditions de travail (effectifs, horaires, salaires, formation continue, protection contre les licenciements, etc.) indispensables pour garantir des prestations de qualité tout en respectant les droits des salarié·e·s chargé·e·s de fournir ces prestations ; (3) les procédures régulières de consultation et de participation nécessaires pour ajuster les prestations aux besoins, pouvant évoluer, des usagers ; (4) les ressources fiscales (et leur répartition) pour financer ces services publics.
  • Les objectifs de la « modernisation » voulue par la droite et le patronat sont tout autres : raboter les droits des salarié·e·s du public au niveau du non-droit qui domine dans le privé ; liquider toute protection contre les licenciements ; supprimer les mécanismes salariaux garantis (annuités, compensation du renchérissement) ; ébranler les références salariales claires pour ouvrir la voie aux intéressements et autres primes au mérite ; miner les retraites, aujourd’hui une source importante de sécurité pour les fonctionnaires.
    Le chef du personnel du canton de Vaud, M. Daler, a parfaitement synthétisé le contenu social de cette démarche : baisser les salaires les plus bas (- 20 % !) et augmenter les plus élevés, à commencer par le sien, sans doute ! (Le Temps, 13 décembre 1999)
    Bref, le but est de permettre à la pression de la concurrence, renforcée par le chômage, de ravager également les conditions de travail des hommes et des femmes travaillant dans les services publics. Cette « modernisation » est en fait une régression sociale. Elle va de pair avec la privatisation des services publics, ouverte comme dans les télécoms, ou rampante comme à la Poste ou aux CFF, ainsi qu’avec une remise en cause de la qualité des prestations.

Soutenir un référendum syndical contre la suppression du statut des fonctionnaires fédéraux

  • La suppression du statut des fonctionnaires fédéraux, menée tambour battant aux Chambres fédérales par une droite regonflée, notamment depuis les dernières élections nationales, va jouer dans ce contexte le rôle d’un signal.Elle va affaiblir d’un coup les droits de dizaines de milliers de salarié·e·s. Elle va accélérer, par mimétisme, la remise en cause du statut des salarié·e·s de la fonction publique dans les cantons, dans le canton de Vaud en particulier. Elle va encourager les employeurs du privé à pousser encore plus loin la flexibilité, la précarité, les salaires à la performance ou au mérite, le refus de toute protection contre les licenciements. Il est donc important que les multiples volontés de défense des droits des salarié·e·s qui se sont manifestées cette année convergent pour s’opposer à la suppression du statut des fonctionnaires fédéraux et, dans le sillage, des statuts cantonaux encore en vigueur.
  • Une fois de plus, des voix s’élèveront, dans ce qui s’appelle la gauche et dans le mouvement syndical, pour prêcher la « raison ». Il faudrait éviter de « provoquer » la droite. Il faudrait chercher un compromis avec les « bourgeois modérés ». Et, surtout, il ne faudrait pas oublier d’être « moderne », et cesser de s’accrocher à des statuts ayant dépassé l’âge de la retraite.
    Ces refrains, nous les connaissons. Ce sont ceux qui ont accompagné les Tables rondes, la cantonale comme la fédérale. Avec le résultat que l’on sait. D’un côté, les mobilisations, pour défendre les droits des salarié·e·s et des chômeurs, les assurances sociales et les services publics, qui sont freinées, voire désorientées. De l’autre, la droite et le patronat qui poursuivent leurs plans, avec à peine un léger retard sur l’horaire.
  • C’est au contraire en préparant dès maintenant un appui déterminé à un référendum syndical contre la suppression du statut des fonctionnaires fédéraux que l’on se donnera le plus de moyens de bloquer cette attaque.
    Ce combat concerne autant les salarié·e·s du privé que ceux du public. Le démantèlement des quelques protections dont bénéficient encore les fonctionnaires ne sera pas seulement synonyme de dégradation des prestations des services publics. Ce sera le signal pour une nouvelle vague d’exigences encore accrues des patrons du privé.

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