«On ne signe rien»
Jean-Marie Battini *
Le 26 octobre, les Nestlé ont appris le nom du repreneur de l’usine de Marseille : Net Cacao, créée pour l’occasion par un gros fournisseur en agroalimentaire. Entretien avec Joël Budanic et Serge Borel, de la CGT.
Cette lutte de 18 mois est-elle finie ?
Joël Budanic - Cette reprise est une acceptation par la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de ce que nous défendons depuis plusieurs mois : le site de Saint-Menet est viable. Mais la lutte n’est pas finie, car le compte n’y est pas. Seul le « chocolat » fait l’objet de la reprise, et l’impasse est faite sur le « café », à cause du veto maintenu de Nestlé. Seulement 180 emplois seraient sauvegardés dans l’immédiat (sur les 427), et 132 seraient créés d’ici à 2010. Les études montrent que la reprise de toutes les activités (chocolat et café soluble) permettrait non seulement le maintien des 427 emplois, mais aussi des embauches supplémentaires.
Sous la pression de Nestlé, le préfet a voulu accélérer les choses. De notre côté, nous disons qu’il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. Il faut étudier les positions de chacun, vérifier les engagements de Nestlé et, surtout, assurer la garantie et la sauvegarde des intérêts des salariés. Notre position est claire : on ne bloque rien, mais on ne signe rien non plus. On contrôle, on vérifie. Après cela, nous informerons les salariés. Nestlé rend des comptes à ses actionnaires, et nous, aux salariés.
Quelles sont vos exigences ?
J. Budanic - Le processus engagé doit aboutir à la reprise dans le respect des contrats de travail. Comme nous l’avons dit au gouvernement, nous n’accepterons pas le cadre fixé par Nestlé, qui évoque toujours une cessation. La CCI, qui reprenait les arguments de Nestlé sur la non-viabilité d’une reprise, déclare aujourd’hui que ce projet est très important pour l’ensemble de la zone et pour le port de Marseille.
Quelle est la prochaine étape ?
Serge Borel - Le préfet voulait aller vite et boucler l’affaire, mais il est clair que la CGT ne signera rien. C’est au comité d’entreprise (CE) de l’usine et au comité central d’entreprise (CCE) de prendre la décision. Le syndicat ne discutera qu’après des conditions sociales, pour faire respecter les intérêts des salariés.
Quel est le sentiment du personnel ?
J. Budanic - Nous avons tenu une assemblée générale, et les salariés nous font majoritairement confiance. Ils veulent éviter le projet de Nestlé et son plan « social ». Mais ils craignent une nouvelle magouille de la direction.
S. Borel - Depuis plus d’un mois, nous en sommes à une moyenne de dix heures de grève par semaine. C’est dur. Il y a des hauts et des bas ainsi qu’un relâchement de l’énergie chez certains (c’est long 18 mois de lutte). Le syndicat doit tenter de convaincre les hésitants sans les rejeter. L’issue de notre combat en dépend.
* article paru dans Rouge 2132
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