Brésil
 
 

Nestlé répond et pratique la "Nestlangue"

Nestlé à réagi à l'article du 29 novembre (voir "Nestlé contraint de renoncer à l'exploitation de la source de São Lourenço ?") par une lettre de lecteur dans Le Temps du 10 décembre, où le directeur adjoint et porte-parole de Nestlé F.-X. Perroud prétend que: « s’il est vrai que la loi n’autorise pas une modification quelconque d’une eau "minérale", il eût été facile à l’auteur d’obtenir le renseignement que “Pure Life” n’a jamais été vendue comme telle, mais bien comme “eau purifiée”».

M. le directeur adjoint joue sur les mots. Il est certain que Pure Life n’est pas une eau minérale, mais une eau industrielle, obtenue par soustraction et / ou ajout de minéraux, de façon à atteindre les mêmes normes standardisées au niveau mondial, que la matière première soit une eau de source, de rivière, voire du robinet (comme on l’a vu dans le cas de Coca-Cola en Grand-Bretagne).

Mais ce dont il est question, c’est de l’eau telle qu’elle sortait de la source, puis du puits foré par Nestlé. Cette eau chargée en fer et « impropre à la consommation » selon Nestlé, était pourtant de longue date utilisée pour ses vertus curatives, comme de nombreuses eaux minérales, au Brésil et ailleurs. Cette eau était bel et bien minérale, longtemps avant que Nestlé ne songe à la vendre – et après si Nestlé en a laissé. Et la législation brésilienne interdit bel et bien l’altération de cette eau, soit très exactement ce que Nestlé faisait en la transformant en Pure Life. La casuistique de M. Perrroud ne tient donc pas debout.

Par ailleurs, M. Perroud n’aborde pas le second volet de l’article du 29 novembre, soit la plainte instruite par le Ministère Public brésilien contre Nestlé pour les dégâts causés au «parc des eaux» dans lequel se situent l’usine et le puits de Nestlé, en particulier le tarissement et la modification de la composition des sources voisines, toujours utilisées pour leurs vertus thérapeutiques. Il est vrai que les relations publiques de Nestlé ne visent qu’à donner au public, suisse en premier lieu, l’impression que les critiques qui sont faites à la multinationale viennent toujours de gens au minimum mal informés, au pire malintentionnés. Un démenti hautain d’une partie d’un article suffit à cet objectif.

Enfin, au-delà de son efficacité espérée, la casuistique de M. Perroud est révélatrice de la prétention des multinationales à s’emparer non seulement de la réalité du monde, mais aussi de sa description: de même qu’un·e salarié·e n’est plus qu’une ressource humaine au cas où il est utile, et une charge salariale quand il ne l’est plus, une eau n’est plus minérale en soi, mais seulement si elle est vendue comme telle.

Alain Gonthier
Conseiller communal, Mouvement pour le socialisme, Vevey