Le 14 juin 1991, la grève des femmes a fait entendre une profonde aspiration: «Assez d'inégalités! C'est en agissant ensemble, nous les femmes, et les hommes qui nous soutiennent, que nous bousculerons l'ordre patriarcal et les mécanismes économiques, sociaux, politiques, culturels qui le perpétuent.»
10 décembre, miroir des inégalités
Douze ans plus tard, un constat peut être fait. La détermination émanant des centaines de milliers de femmes ayant croisé les bras en 1991 a rendu possible des avancées: Loi sur l'égalité, nouveau droit matrimonial, solution des délais en matière d'avortement, quelques procès gagnés en matière d'égalité salariale.
Mais on est très loin du compte. Et 2003 a été une année noire: nouvelle élévation de l'âge de la retraite des femmes (11e révision de l'AVS), nouveau référendum UDC contre une assurance maternité. Enfin, le 10 décembre, l'élection au Conseil fédéral a fait déborder la coupe.
La mise à l'écart des femmes (sauf une), pour permettre l'entrée de deux représentants masculins de l'oligarchie économique et financière dirigeant ce pays, a soudain offert un miroir grossissant de la régression sociale ayant marqué la dernière décennie (même s'il est souvent impossible de déceler une différence entre les priorités politiques de Ruth Metzler, Christine Beerli, Hans-Rudolf Merz ou Christoph Blocher).
Les inégalités sont plus que jamais là. Les contre-réformes conservatrices les ont en fait creusées dans toute la société et les femmes sont parmi les premiers à en supporter les conséquences. L'archipel des bas salaires reste toujours aussi vaste et féminin. Les femmes sont les premières concernées par le chômage, comme par la précarité et la flexibilité sans limite. Cela transforme de plus en plus en casse-tête l'agencement de leurs différents temps de vie - travail, éducation des enfants, tâches domestiques, vie sociale et personnelle. Il n'existe toujours pas d'assurance maternité fédérale. La violence dont sont victimes les femmes n'a pas reculé. La publicité sexiste s'étale sans gêne, dans ce monde où tout doit être marchandise. L'égalité est même devenue un argument servant à justifier des reculs sociaux, comme l'élévation de l'âge de la retraite des femmes.
Les milliers de femmes, et d'hommes, qui ont manifesté le 10 décembre 2003, et les jours suivants, ont fait éclater leur colère face à cette réalité: leur protestation contre l'éjection d'une femme du Conseil fédéral s'est immédiatement étendue aux inégalités persistantes qui façonnent leur quotidien. Cela a donné un nouvel élan à la préparation de la Journée internationale des femmes, le 8 mars 2004. Afin d'amplifier cette dynamique, deux enseignements sont à tirer de la dernière décennie.
L'égalité sapée par la loi du profit
L'égalité entre femmes et hommes est inscrite dans la Constitution; depuis 1996, la Loi sur l'égalité est en vigueur pour concrétiser ce principe. Mais, dans la réalité, les inégalités triomphent.
C'est que les principes démocratiquement décidés sont sapés quotidiennement par le fonctionnement d'une économie capitaliste débridée, qui impose sa loi à toute la société. Le capitalisme ne reconnaît qu'une règle: accroître les profits accaparés par une infime minorité, propriétaire et gérante des grands conglomérats dominant l'économie (les UBS, Credit suisse, Swatch et autres Novartis ou Migros). Cela exige de reproduire les inégalités et d'en creuser de nouvelles - ici comme à l'échelle planétaire. Les femmes sont parmi les premiers à en faire les frais.
Prendre au sérieux l'exigence d'égalité amène donc à poser une question: comment donner à la collectivité les moyens de faire respecter un choix démocratique - l'égalité des droits entre femmes et hommes - et, pour cela, d'imposer sa loi à l'économie et à la petite minorité qui la contrôle et en profite?
On n'y parviendra pas sans mener, chaque fois que nécessaire, des incursions dans les «domaines réservés» de la propriété privée et du marché. Que ce soit pour créer les services publics indispensables, par exemple, à une prise en charge convenable de la petite enfance et des enfants en âge scolaire; pour assurer à chaque fem-
me et à chaque homme une vraie sécurité sociale; ou pour retisser un ensemble de droits collectifs au travail, patrimoine des femmes et des hommes salarié·e·s, faisant barrage au despotisme des employeurs.
Dans l'immédiat, un enjeu essentiel est de faire échouer la 11e révision de l'AVS le 16 mai prochain.
Prenons en main notre cause
Après le 14 juin 1991, les femmes associées aux partis politiques installés ont mis en relief une voie censée faire avancer notre cause: déléguer davantage de femmes dans les parlements et les exécutifs.
Une représentation proportionnelle des femmes dans les institutions politiques est certes un des changements nécessaires pour combattre l'ordre patriarcal. Mais le bilan des années 90 est clair: ce n'est pas en déléguant la défense nos droits, y compris à des femmes, que nous avancerons. D'ailleurs l'augmentation de l'âge de la retraite des femmes a commencé avec la 10e révision de Ruth Dreifuss. Quant aux droits des femmes requérantes d'asile ou sans statut légal, ils n'ont cessé de reculer avec Ruth Metzler.
En réalité, c'est seulement lorsque les femmes ont pris directement en main le combat pour leurs exigences - pour le droit de vote, pour le droit à l'avortement, pour faire avancer l'idée de l'égalité - et qu'elles ont mené des actions collectives rompant avec le ron-ron de l'ordre établi, comme le 14 juin 1991, que des changements ont eu lieu. Aujourd'hui, c'est à nouveau cette voie-là que nous devons emprunter, avec la détermination et la persévérance que donne la colère.
Précarité, bas salaires, horaires impossibles, double journée de travail
Le despotisme du profit contre l'égalité
La dernière décennie a enterré les espoirs, largement répandus, d'un progrès social continu. Elle a au contraire été marquée par le creusement des inégalités sociales. L'ensemble des salarié·e·s ont subi cette régression. Mais les femmes ont été au premier rang.
Inégalités: instantané... figé
- Les femmes sont de plus en plus nombreuses à mener une activité professionnelle: 1,8 million en 2002 contre 1,5 en 1991.
- Elles sont aussi plus nombreuses à travailler à temps partiel: 55% en 2002 contre 43% en 1991.
- Les femmes sont nettement plus touchées que les hommes par le chômage et le sous-emploi, qui ont battu un record en 2003. Leur taux de chômage était de 4,4%, contre 3,8% pour les hommes. De plus, une femme sur six (15,7%) voudrait travailler davantage si elle le pouvait. Contre 3,5% des hommes. Au total, une femme active sur cinq (20,0%) souffre de sous-emploi. C'est trois fois plus que pour les hommes (7,3%).
- Les femmes sont plus souvent condamnées à la précarité. Deux tiers des personnes travaillant sur appel, ou ayant des contrats de durée déterminée, sont des femmes.
- Le niveau de formation des femmes et des hommes n'a cessé d'augmenter, mais «sans que l'écart entre les sexes ne se réduise», constate l'Office fédéral de la statistique (OFS). Les projets de porter à 5000 fr. les taxes universitaires ne vont pas améliorer cette situation.
- En 2002, le salaire des femmes était globalement inférieur de 20,7% à celui des hommes. Cet écart, qui était de 24% en 1994, n'a plus bougé depuis 1998.
- Des centaines de milliers de femmes restent prisonnières de l'archipel des bas salaires:
• En 2002, 10,5% (88000) des femmes travaillant à plein-temps gagnaient moins de 3000 fr. net. C'est proportionnellement 5 fois plus que pour les hommes (2,1%, soit 44000). Presque une femme sur deux à plein-temps (44,5%, soit 373000) ne dépasse pas 4000 fr. net, alors que c'est le cas d'un homme sur sept (14,4%, soit 301000).
• Mêmes inégalités parmi les personnes travaillant à temps partiel. Près d'une femme sur deux (48,1%, soit 490000) gagne moins de 2000 fr. net contre 39,5% pour les hommes (soit 92000).
Cette réalité n'est pas seulement celle des vendeuses, des serveuses, des coiffeuses ou des nettoyeuses. La grève des ouvrières d'Allpack à Reinach (BL), qui emballaient des produits de Novartis ou Migros pour un salaire brut de 3300 fr., a aussi montré le réseau d'entreprises sous-traitantes surexploitant leur personnel pour s'adapter aux conditions de leurs impitoyables donneurs d'ordre: les «fleurons» de l'économie suisse.
- L'image du partage des tâches entre femmes et hommes façonnée par la représentation patriarcale de la société - l'activité professionnelle aux hommes, les tâches domestiques et éducatives aux femmes - est de plus en plus décalée par rapport à la réalité. En 2001, plus de 70% des femmes ayant des enfants de moins de 15 ans avaient une activité professionnelle, contre 60% en 1991.
Mais ce «modèle» continue à être utilisé pour imposer, majoritairement, aux femmes une insertion discriminée dans le monde du travail: temps partiel, donc souvent plus forte flexibilité et plus grande précarité, salaires plus bas, perspectives professionnelles moins bonnes.
Cette réalité, en retour, contribue à perpétuer le partage traditionnel des tâches dans la sphère domestique, qui fonctionne grâce au travail gratuit des femmes. En moyenne, elles consacrent presque deux fois plus de temps (31 heures par semaine) que les hommes (17 heures) aux tâches domestiques et éducatives.
En même temps, cela fait que le temps partiel apparaît souvent comme la seule solution réaliste pour concilier vie professionnelle et responsabilités familiales. Surtout avec des horaires de travail parmi les plus longs d'Europe. Concilier deux pleins temps est dès lors soit un choix pour des couples aisés qui, grâce au différentiel entre salaires, paient une aide (peut-être une femme sans statut légal!), soit une obligation pour des ménages n'arrivant pas à joindre les deux bouts. Le cercle vicieux qui contribue à la reproduction du modèle patriarcal est ainsi bouclé.
Inverser la tendance
Depuis le début des années 90, les associations patronales et leurs relais politiques n'ont de cesse d'imposer l'idée que les inégalités ne sont pas quelque chose qui doit être combattu. Ils les présentent au contraire comme «naturelles» et même profitables au bon fonctionnement de l'économie. C'est une des idées force de la contre-révolution néo-libérale.
Une convergence s'impose par conséquent entre le combat contre les inégalités spécifiques imposées aux femmes et l'urgence de contrebattre ce formatage régressif de l'ensemble de la société.
Deux questions peuvent, immédiatement, commencer à concrétiser cette confluence:
- L'éradication des bas salaires.Contrairement à ce que laisse croire le mythe de la «Suisse prospère», ce n'est pas une réalité marginale, mais la situation imposée à des centaines de milliers de femmes et d'hommes.
Compte tenu du coût de la vie effectif, un salaire mensuel de 4000 fr. pour un travail à plein-temps est un strict minimum. Cela bouleverserait la situation de centaines de milliers de femmes salariées. Cela donnerait un coup d'arrêt au creusement des inégalités. Après les dénonciations médiatiques et les campagnes sectorielles, il est temps de passer la vitesse supérieure. L'enjeu est l'introduction d'un salaire minimum légal, valable dans toutes les branches et toutes les régions.
- La diminution radicale du temps de travail.C'est une mesure indispensable pour répondre au sous-emploi, qui ne cesse d'augmenter en Suisse depuis 1991, et donc aussi pour faire reculer la peur dans les entreprises. Elle peut également être un déclic pour repenser le partage des tâches entre femmes et hommes, et donc pour faire évoluer la manière dont ils et elles conçoivent leur place réciproque dans la société et leurs rapports entre eux. Cela exige cependant que cette mesure soit accompagnée d'une prise en charge publique et collective de la petite enfance (cf. p. 4), ainsi que de campagnes incitatives et éducatives en faveur d'un nouveau partage des tâches entre femmes et hommes.
Sources: Les données chiffrées sont tirées des publications de l'Office fédéral de la statistique, en particulier du rapport Où va l'égalité?, édité en 2003.
Le 16 mai: NON à la 11e révision de l'AVS
Pour une vraie sécurité sociale
Le 16 mai, nous devrons nous prononcer sur la 11e révision de l'AVS. Cette votation aura une influence majeure sur l'avenir du système des retraites en Suisse. Les femmes sont encore plus concernées que les hommes.
Les femmes piégées par la 10e révision
L'histoire de la 11e révision de l'AVS commence... avec la 10e, orchestrée par Ruth Dreifuss. C'est elle qui, pour la première fois depuis la création de l'AVS en 1948, a introduit une augmentation de l'âge de la retraite des femmes: de 62 ans à 64 ans.
Pour faire avaler la pilule, Ruth Dreifuss avait promis que la révision suivante - la 11e - introduirait la retraite flexible, censée permettre à toute personne d'interrompre son travail dès 62 ans.
On connaît le résultat. La 11e révision de l'AVS porte l'âge de la retraite des femmes à 65 ans. La retraite flexible n'a servi qu'à faire diversion. Cette révision diminue aussi fortement les rentes de veuves. Enfin, elle espace l'indexation des rentes (tous les 3 ans au lieu de tous les 2) ce qui diminuera leur pouvoir d'achat.
Si la 11e révision l'emporte en votation le 16 mai prochain, les Couchepin et autres Merz auront la voie libre pour appliquer leur programme: la retraite à 67 ans pour toutes et tous, la chute progressive du niveau des rentes avec l'abolition de l'indice mixte, une place encore accrue au 2e et 3e piliers, profondément inégalitaires.
AVS, 2e pilier: la vérité des chiffres
A l'inverse, un NON sera un coup de frein à ces projets. Il ouvrira la possibilité de poser une question essentielle: comment garantir à chacune et chacun le droit à la retraite dès 62 ans, avant d'être usé·e par le travail, et avec des rentes suffisantes?
Les femmes sont bien placées pour apporter une réponse claire à cette question. Qu'on en juge:
• En 2000, la rente AVS moyenne touchée par les femmes s'élevait à 1663 fr. par mois; celle des hommes à 1634 fr.
• Par contre, la rente moyenne du 2e pilier touchée par les femmes était de 1337 fr. par mois, contre 2780 fr. pour les hommes. Une femme sur deux bénéficiant d'une rente du 2e pilier recevait moins de 833 fr. par mois, contre moins d'un homme sur cinq (18,2%).
• En réalité, l'inégalité entre femmes et hommes dans le 2e pilier est bien plus grande encore. En effet, en 2000, 500000 femmes actives (soit 28%) n'étaient tout simplement pas assurées au 2e pilier, parce qu'elles gagnaient un salaire trop bas pour cela (contre 200000 hommes, soit 8,6%). Si l'on tient compte des femmes sans activité professionnelle - mais de loin pas sans travail! - une femme sur deux n'a pas de 2e pilier.
Solidarité + égalité = sécurité sociale
Ces différences choquantes illustrent la différence entre le système de l'AVS et le 2e pilier.
L'AVS est construite autour d'un mécanisme de solidarité. Elle garantit une rente à chaque femme et chaque homme ayant vécu en Suisse. Elle assure une plus grande égalité, notamment entre les sexes. La vendeuse de la Coop cotise chaque mois en versant 4,2% de son salaire de 3000 fr.; le directeur de la banque Coop avec 4,2% de son salaire de 30000 fr. Mais, à la retraite, la rente AVS du directeur ne sera même pas le double de celle de la vendeuse.
A l'inverse, dans le 2e pilier, chacun cotise pour «son propre compte». Conséquence, à la retraite, la vendeuse touchera une rente de misère. Et le directeur de banque une rente plus que confortable, encore augmentée d'un solide 3e pilier.
Si l'on veut mettre fin à ces inégalités, dont les femmes sont les premières victimes, il faut sortir du système actuel des trois piliers - AVS, 2e pilier, épargne individuelle défiscalisée (3e pilier). Il faut investir les ressources rendues ainsi disponibles dans le développement d'une vraie sécurité sociale fondée sur la solidarité, une super-AVS. Celle-ci ne devrait laisser aucune femme, ni aucun homme, avec une rente mensuelle inférieure à 3000 fr. (la rente minimale AVS est aujourd'hui de 1055 fr.).
Cette sécurité sociale sera beaucoup plus juste que le système actuel, mais également plus sûre: ces deux dernières années nous ont montré combien les promesses faites au nom du 2e pilier sont trompeuses.
Financement: faux problème
On veut nous faire croire que le financement d'une telle sécurité sociale ne serait pas possible à cause du «vieillissement de la population». C'est un mensonge. Du même type que celui qui sera utilisé pour obliger les jeunes et leurs parents à payer 5000 fr. par an pour faire des études.
L'augmentation de la productivité, qui a permis jusqu'à ce jour de financer sans problème l'AVS, le permettra encore à l'avenir. Entre 1950 et 2000, la part des richesses nationales (du produit intérieur brut/PIB) consacrée à l'AVS a été multipliée par huit. Cela a permis d'assurer une importante augmentation des rentes à un nombre croissant de retraité·e·s. Or, pour financer cela, le simple doublement des cotisations salariales a suffi (de 2% à 4,2%, auxquels s'ajoute la «part patronale» équivalente). Et cela n'a pas «ruiné» l'économie suisse.
Le même mécanisme peut se reproduire à l'avenir. D'autant plus que, depuis deux décennies, les employeurs n'ont cessé d'augmenter la part des richesses produites chaque année qu'ils s'approprient sous forme de profits. C'est une cause fondamentale du creusement des inégalités. Il faut inverser cette tendance et le «problème» du financement des retraites s'évaporera.
Assurance maternité, congé parental, crèches publiques
Des droits pour faire reculer l'ordre patriarcal
Nous devrons voter sur un nouveau projet d'assurance maternité. Son contenu est minimaliste: 14 semaines avec un salaire compensé à 80%. Comme si, après la naissance d'un enfant, le loyer, les impôts, l'assurance maladie, les frais de nourriture baissaient de 20%. Il est cependant combattu par un nouveau référendum de l'UDC.
Malgré ses limites évidentes, ce projet généralise un droit pour toutes les femmes exerçant une activité professionnelle. Nous le soutiendrons en votation.
Hasler bétonne
Peter Hasler, le directeur de l'Union patronale suisse (UPS), annonce que le patronat a «changé d'avis»et qu'il accepte, cette fois, ce projet d'assurance maternité (Le Temps, 17 janvier 2004).
La «générosité» de Hasler n'a pas de secret. On ne pouvait pas concevoir projet plus minimaliste. Les combats menés avec succès par les femmes au niveau cantonal (Genève, Vaud, Zurich) pour des assurances maternité menaçaient les employeurs d'un système plus coûteux et plus complexe.
Le jeu du patronat est donc transparent: accepter cette mini avancée, inévitable, pour bétonner son opposition à toute autre politique publique en matière de droits des parents et de garde des petits enfants.
Or, dans les années à venir, il est justement indispensable de relancer une bataille d'envergure pour de telles politiques publiques.
Un congé parental, aussi pour les pères
Pour le bien-être de l'enfant et pour la qualité de la relation qu'il va établir avec sa mère et son père, il est nécessaire de disposer d'un congé maternité de 16 semaines après l'accouchement, payé à 100%. Il doit être complété par un congé allaitement et par un congé parental. Une partie de ce dernier devrait être obligatoirement prise par le père, comme c'est le cas dans les pays nordiques. Une plus grande implication des pères, dès le début, est une mesure nécessaire pour faire évoluer les conceptions en matière de partage des tâches. Ce congé parental doit s'accompagner d'une perte de gain et d'une garantie de retrouver son emploi au terme du congé.
Des crèches publiques, comme l'école
Les infrastructures de garde des petits enfants (crèches, garderies, etc.) et des enfants en âge scolaire sont aujourd'hui gravement sous-développées. Seuls 28% des petits enfants gardés à l'extérieur sont confiés à des crèches ou d'autres institutions spécialisées. Dans la majorité des cas (56%), c'est la famille qui est sollicitée. C'est-à-dire, souvent, le travail gratuit et invisible des femmes: les grands-mamans.
Le patronat va continuer à faire appel aux femmes pour répondre à ses besoins de main-d'úuvre. Il accepte donc qu'un certain nombre d'infrastructures supplémentaires soient créées. Mais, selon Hasler, cela doit se faire sur la base de «l'initiative privée»(Le Temps, 17 janvier 2004).
En clair, la garde des enfants dans des structures de qualité ne doit pas devenir un droit pour les familles, assuré par un service public, mais dépendre du bon vouloir des employeurs. Cette politique, si elle s'impose, aura deux conséquences.
Premièrement, des milliers de familles continueront à ne pas disposer de place pour la garde de leurs petits enfants, à des tarifs abordables. Ce sont les femmes qui continueront à jongler pour faire face.
Deuxièmement, imaginons un instant que l'école cesse d'être publique, ne soit plus un droit et que son financement dépende de la bonne volonté des employeurs. Cette hypothèse nous éclaire sur un enjeu essentiel: l'école publique, parce qu'elle a instauré un droit universel à l'éducation, a fortement contribué à modifier la manière dont toute la société conçoit l'enfance, ses droits, sa place dans la société, la responsabilité des parents.
De même, le jour où sera acquis le droit pour chaque petit enfant à être gardé, gratuitement, dans le cadre de structures publiques, un espace s'ouvrira pour que se modifient les représentations que les femmes et les hommes se font au sujet de la relation à leurs enfants, de l'articulation entre vie professionnelle et responsabilités familiales, du partage des rôles entre femmes et hommes. Les possibilités de rompre avec le modèle patriarcal en seront renforcées.
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