Irak-Etats-Unis Tom Delay leader républicain de la Chambre des représentants
Rêves et délires Edward saïd L'article, ici traduit, a été publié en anglais dans le numéro 652 de Al-Ahram Weekly on line, le 27 août 2003. Dans cet article, écrit quelques semaines avant sa disparition, Edward saïd met en lumière "la démagogie idéologique qui fait de la langue et de la réalité la propriété exclusive de la puissance américaine ou des soi-disant perspectives occidentales". Un texte à méditer par toutes celles et tous ceux qui voient dans l'occupation de l'Irak le déni non seulement du droit à l'autodétermination du peuple irakien, mais l'expression la plus tangible des contours politiques, économiques et culturels de l'impérialisme, en ce début de XXIe siècle. Réd. Tom Delay, le chef de file de la majorité de la Chambre des représentants aux Etats-Unis, un républicain du Texas, est communément décrit comme un des trois ou quatre hommes les plus puissants de Washington. En juillet dernier [2003], il faisait savoir ce qu'il pensait de la feuille de route et du futur de la paix au Moyen-Orient. Ses déclarations servaient à annoncer le voyage qu'il entreprit ensuite en Israël et dans plusieurs pays arabes où selon ce que les médias ont rapporté il a répété la même chose. Sans mâcher ses mots, Tom Delay se déclarait opposé au soutien que l'administration Bush apporte à la feuille de route et tout particulièrement opposé à la disposition de cette dernière qui envisage la création d'un Etat palestinien. "Ce serait un Etat terroriste", déclara-t-il catégoriquement, utilisant le terme "terroriste" de la manière qui est devenue habituelle dans le discours officiel aux Etats-Unis, c'est-à-dire sans considérer ni les circonstances, ni la définition du terme, ni les caractéristiques concrètes. Il ajoutait que ses idées à propos d'Israël lui venaient de ses convictions en tant que "sioniste chrétien", une formule qui est synonyme non seulement d'appui à tout ce qu’Israël fait, mais également d'affirmation du droit théologique de l'Etat juif de continuer à faire ce qu'il fait sans se préoccuper de savoir si quelques millions de Palestiniens "terroristes" auront ou non à en souffrir. Le nombre de personnes dans le sud-ouest des Etats-Unis qui pensent comme Tom Delay s'élève à rien moins que 60 ou 70 millions. Parmi elles, et il est important de le noter, figure nul autre que George W. Bush, qui est lui aussi un chrétien "né une seconde fois" (c'est-à-dire "né à la foi"), inspiré par le Saint Esprit et pour qui tout ce qui est écrit dans la Bible est à prendre à la lettre. Bush est leur chef et dépend assurément de leur vote pour l'élection présidentielle de 2004, qu'à mon avis il ne gagnera pas. Et parce que sa présidence est menacée par sa politique ruineuse, tant intérieure qu'extérieure, lui et ses stratèges de campagne électorale essayent d'attirer plus de chrétiens d'extrême droite d'autres régions du pays, particulièrement ceux du Mid-West. Tout bien considéré, les conceptions de la droite chrétienne (alliée aux idées et au pouvoir d'influence du mouvement néo-conservateur rageusement pro-israélien) constitue aux Etats-Unis une formidable force en politique intérieure qui est, hélas, le champ où se déroule aux Etats-Unis le débat à propos du Moyen-Orient. Il ne faut jamais oublier qu'aux Etats-Unis, la Palestine et Israël sont considérés comme des questions de politique intérieure et non extérieure. Si donc les déclarations de Tom Delay n'avaient été que les opinions personnelles d'un enthousiaste religieux ou les divagations rêveuses d'un visionnaire inconséquent, on pourrait rapidement les négliger comme n'étant que des bêtises. Mais non, elles représentent un langage de pouvoir auquel il n'est pas facile aux Etats-Unis de s'opposer, puisqu'ici tant de citoyens se croient directement guidés par Dieu dans ce qu'ils voient et croient, et parfois dans ce qu'ils font. On dit que John Ashcroft, le procureur général de l'administration Bush [qui inspire les mesures répressives et sécuritaires aux Etats-Unis], commence chaque journée de travail dans son bureau par une réunion de prière avec ses collaborateurs. Très bien, les gens veulent prier et la Constitution leur garantit une totale liberté religieuse. Mais dans le cas de Tom Delay, en disant qu'ils constitueraient un pays entier de "terroristes", c'est toute une "race de gens", les Palestiniens, qu'il a définie comme des ennemis de l'humanité, puisque c'est la définition courante du terme à Washington. Ce faisant, il a sérieusement entravé leur progrès vers l'autodétermination et contribué à leur imposer encore plus de châtiments et de souffrances, tout cela au nom de raisons religieuses. De quel droit? Considérez toute l'inhumanité et l'arrogance impérialiste de la position de Tom Delay; du haut de leur situation de pouvoir à 20'000 kilomètres, des gens comme lui, aussi ignorants de la vie réelle des Arabes palestiniens qu'un habitant de la Lune, peuvent réellement rendre jugement contre la liberté des Palestiniens, la retarder et les condamner à des années supplémentaires d'oppression et de souffrances, pour la seule raison qu'ils pensent qu'ils sont tous des terroristes. Et cela parce que son sionisme chrétien personnel, qui n'a cure ni de preuves ni de raisons, le lui dicte ainsi. De ce côté de l'Atlantique donc, en plus du lobby israélien, pour ne rien dire du gouvernement israélien de l'autre côté, les Palestiniens , hommes, femmes et enfants , doivent subir plus d'obstacles et de barrages routiers mis en travers de leur chemin au sein du Congrès des Etats-Unis. C'est ainsi. Ce qui m'a frappé dans les propos de Tom Delay, ce n'était pas seulement leur irresponsabilité et la désinvolture barbare (le qualificatif très en vogue pour justifier la guerre contre le terrorisme) avec lesquelles il balaye du revers de la main des milliers de gens qui ne lui ont fait aucun mal, mais également l'irréalité. Ce type d'irréalité délirante que ses déclarations partagent avec une si grande part de la Washington officielle, dès que les discussions , et la politique pratiquée , portent sur le Moyen-Orient, les Arabes et l'Islam. Depuis les événements du 11 septembre, cela a atteint des niveaux sans précédent d'abstraction extrême, voire inepte. L'hyperbole , la technique qui consiste à trouver des termes toujours plus excessifs pour décrire et sur-décrire une situation , s'est emparée du domaine public, à commencer par Bush lui-même, bien sûr. Ses déclarations métaphysiques sur le Bien et le Mal, l'axe du Mal, la lumière du Tout-Puissant, et ses effusions interminables - me permettra-t-on de dire nauséeuses? - sur les maux du terrorisme ont porté le langage employé, pour parler de l'histoire et de la société humaine, à des niveaux inédits de pure invective, totalement hors de toute fonction. Tout cela est entremêlé, bien sûr, de sermons solennels adressés au reste du monde pour l'exhorter à être pragmatique, à éviter l'extrémisme, à être civilisé et rationnel. Et, au même moment, les stratèges politiques des Etats-Unis, dotés d'un pouvoir exécutif sans entraves, peuvent décréter, sans sortir de leurs confortables bureaux à Washington, munis de l'air conditionné, un changement de régime ici, une invasion là, la "reconstruction" de tel autre pays. Est-ce cela une manière de fixer les normes d'une discussion civilisée et de faire avancer les valeurs démocratiques, y compris l'idée même de la démocratie? Un des thèmes de base du discours orientaliste depuis le milieu du 19e siècle consiste à dire que la langue arabe et les Arabes sont affligés d'une mentalité et d'un langage qui n'ont que faire de la réalité. De nombreux Arabes en sont venus eux-mêmes à croire cette baliverne raciste, comme si des langues nationales entières comme l'arabe, le chinois, ou l'anglais représentaient directement l'esprit de leurs utilisateurs. Cette idée fait partie du même arsenal idéologique utilisé au 19e siècle pour justifier l'oppression coloniale. Les "nègres" ne savent pas parler correctement, c'est pourquoi pour Thomas Carlyle [1795-1881, écrivain et historien britannique], ils devaient rester esclaves ; la langue "chinoise" est compliquée, c'est pourquoi, selon Ernest Renan [1823-1892, historien français], les Chinois, hommes et femmes, sont sournois et doivent être maintenus en sujétion ; et ainsi de suite. Personne ne prend plus aujourd'hui de telles idées au sérieux, sauf s'il est question des Arabes, de la langue arabe et des arabistes. Dans un texte qu'il avait écrit il y a quelques années, Francis Fukuyama, le pontifiant philosophe de droite brièvement célébré pour son idée absurde de la "fin de l'histoire", écrivait que le Département d'Etat ferait mieux de se débarrasser de ses arabistes et fonctionnaires parlant arabe, parce qu'en apprenant la langue arabe ils absorbaient également les "délires" des Arabes. Aujourd'hui il n'y pas un philosophe de village des médias, y compris des gros calibres comme Thomas Friedman [édtorialiste au New York Times], dont les bavardages ne soient pas de la même veine, et qui ne s'empresse d'ajouter, pour décrire scientifiquement les Arabes, qu'un de leurs nombreux délires, c'est la vision "mythique" qu'ils ont habituellement d'eux-mêmes en tant que peuple. S'il faut en croire des autorités médiatiques du calibre de Thomas Friedman ou Fouad Ajami [Professeur à la John Hopkins University, directeur du Middle East Studies Program, écrit souvent dans l'influente revue Foreign Affairs, a publié The Dream Palace of the Arabs,Pantheon Books, 1998], les Arabes ne sont qu'un vague rassemblement de vagabonds, de tribus brandissant des drapeaux, se faisant passer pour une culture et pour un peuple. On pourrait faire remarquer que c'est là un fantasme orientaliste hallucinatoire, qui a le même statut que la croyance sioniste que la Palestine était vide et que les Palestiniens n'y habitaient pas et qu'ils ne comptent certainement pas comme un peuple. Il n'est guère nécessaire d'argumenter contre la validité de tels postulats, tellement il est évident qu'ils découlent de la peur et de l'ignorance. Mais ce n'est pas tout. Les Arabes sont toujours condamnés pour leur incapacité à être réalistes, pour préférer la rhétorique aux faits, pour se complaire dans l'apitoiement sur eux-mêmes et la mégalomanie plutôt que de s'en tenir à un exposé sobre de la vérité. La nouvelle mode, c'est de se référer au rapport du PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement) de l'année passée comme un compte rendu autocritique "objectif" des Arabes. Qu'importe que le rapport soit, comme je l'ai fait remarquer, du niveau d'un mémoire d'étudiant de troisième cycle en sciences sociales, superficiel et insuffisamment réfléchi, destiné à prouver que les Arabes sont capables de dire la vérité sur eux-mêmes. Ce rapport est bien inférieur au niveau de plusieurs siècles de littérature critique arabe, depuis l'époque de Ibn Khaldoun [Né en 1332 à Tunis et mort au caire en 1406, il est l'auteur, entre autres, du Discours sur l'Histoire universelle, Ed. Sinbad, 1997] jusqu'à aujourd'hui. Tout cela est mis de côté, comme est mis de côté le contexte impérial que les auteurs du rapport escamotent allégrement, peut-être pour mieux prouver que leur pensée est sur la bonne longueur d'onde du pragmatisme américain. D'autres experts disent souvent que l'arabe, comme langue, est imprécis et incapable d'exprimer quelque chose avec une véritable précision. Je suis d'avis que de telles remarques sont idéologiquement si malveillantes qu'elles ne nécessitent pas qu'on y réponde. Mais je pense qu'on peut avoir une idée des motivations derrière de tels jugements en considérant le contraste instructif avec un des grands succès du pragmatisme américain qui démontre comment nos chefs actuels et nos autorités opèrent dans le réel en termes sobres et réalistes. J'espère que l'ironie de ce que j'évoque deviendra rapidement évidente. L'exemple auquel je me réfère, c'est la planification faite à Washington pour l'Irak après la guerre. Le Financial Times du 4 août 2003 en fait un récit faisant froid dans le dos. On y apprend qu'au Pentagone, Douglas Leith et Paul Wolfowitz, qui sont des fonctionnaires et non des élus, mais qui se trouvent compter parmi les plus puissants des faucons néo-conservateurs de l'administration Bush et qui ont des liens particulièrement étroits avec le Likoud israélien, dirigeaient un groupe d'experts: " qui avaient toujours été d'avis que ce ne serait pas une simple promenade, mais que cela prendrait 60 à 90 jours avant qu'on puisse se retourner et remettre l'Irak dans les mains... de Chalabi et du Conseil national irakien. Le Département de la Défense pourra alors se laver les mains de toute l'affaire et ressortir rapidement, gentiment et habilement. On laisserait alors derrière nous un Irak démocratique qui acceptera docilement nos voeux et désirs. Ni plus ni moins." Nous savons aujourd'hui, bien sûr, que c'est bel et bien sur la base de cette perspective que la guerre a été engagée et l'Irak occupé militairement sur la foi précisément de tels postulats impérialistes totalement tirés par les cheveux. Le bilan de Chalabi [proche allié de Wolfowitz, membre actuellement du Conseil de gouvernement intérimaire nommé par Washington, ex-banquier poursuivi pour fraude en Jordanie] comme informateur et comme banquier n'est, après tout, pas des meilleurs. Aujourd'hui personne n'ignore ce qui est arrivé en Irak après la chute de Saddam Hussein: la terrible pagaille, depuis le pillage des bibliothèques et des musées (dont la responsabilité incombe absolument à l'armée des Etats-Unis en tant que puissance occupante), l'effondrement total des infrastructures, l'hostilité des Irakiens (qui ne sont après tout pas une seule population homogène) aux forces anglo-américaines, l'insécurité et les pénuries, et par-dessus tout, l'extraordinaire incompétence humaine , je souligne le mot "humaine" , des Garner [ex-général, premier responsable des forces d'occupation], Bremer [Paul Bremer a remplacé Garner et est le proconsul américain de l'Irak] et de tous leurs larbins et soldats, quand il s'est agi d'affronter de manière adéquate les problèmes de l'après-guerre en Irak. Tout cela témoigne de l'espèce de pragmatisme de pacotille ruineux de la pensée américaine supposée contraster avantageusement avec celle des peuples inférieurs comme les Arabes qui, eux, souffrent de délires et sont affligés par-dessus le marché d'une langue défectueuse. La vérité de la chose, c'est que la réalité n'obéit ni aux ordres d'un individu (aussi puissant soit-il), ni n'adhère plus étroitement à certains peuples et mentalités qu'à d'autres. La condition humaine est faite d'expérience et d'interprétation et celles-ci ne peuvent jamais être complètement maîtrisées par le pouvoir. Elles sont le commun domaine des êtres humains dans l'histoire. La terrible erreur commise par Wolfowitz et Leith provient de leur substitution arrogante d'un langage abstrait et en fin de compte ignorant d'une réalité bien plus complexe et récalcitrante. Les résultats épouvantables en sont encore devant nous. N'acceptons donc pas plus longtemps la démagogie idéologique qui fait de la langue et de la réalité la propriété exclusive de la puissance américaine ou des soi-disant perspectives occidentales. Le fond de l'affaire, c'est bien sûr l'impérialisme, cette tâche autoproclamée (en fin de compte banale) de débarrasser le monde de figures malfaisantes comme Saddam au nom de la Justice et du Progrès. Les justifications révisionnistes de l'invasion de l'Irak et de la guerre des Etats-Unis contre le terrorisme ont envahi le discours public et travesti les faits et l'histoire avec une aisance alarmante. Elles comptent parmi les importations les moins bienvenues d'un empire plus ancien et failli, l'empire britannique. En effet ce sont des journalistes britanniques expatriés aux Etats-Unis qui les proclament. Pourquoi n'ont-ils pas l'honnêteté de dire ouvertement oui nous sommes supérieurs et nous réservons le droit de donner aux indigènes une bonne leçon partout dans le monde où nous trouvons qu'ils sont malfaisants et arriérés. Et pourquoi n'en aurions-nous pas le droit ? Parce que ces indigènes aux cheveux crépus ont échoué. Avoir été à la tête de notre empire durant 500 ans nous a permis de bien les connaître et aujourd'hui nous voulons que les Etats-Unis prennent la relève. Ces indigènes échouent à comprendre notre civilisation supérieure, ils s'adonnent à la superstition et au fanatisme, ce sont des tyrans incorrigibles qui méritent châtiment et nous, par Dieu, sommes chargés de cette tâche, au nom du progrès et de la civilisation. Si en plus certains de ces acrobates journalistiques versatiles (qui ont servi tant de maîtres qu'ils n'ont plus de boussole morale du tout) sont capables de citer à l'appui de leurs thèses Marx et les philosophes allemands, malgré leur antimarxisme proclamé et leur ignorance rance de toute langue ou érudition qui ne soit pas anglaise. Combien n'en paraissent-ils alors que plus astucieux. C'est dans le fond juste du racisme, quelle que soit la belle manière de l'habiller. Le problème est en réalité plus profond et plus intéressant que ce que les polémistes et publicistes de la puissance américaine ont imaginé. Partout dans le monde les gens sont en train de vivre le dilemme d'une révolution dans la pensée et dans le vocabulaire du fait que le néolibéralisme et le "pragmatisme" américains sont élevés, par les gouvernants des Etats-Unis, au rang d'une norme universelle, alors que, dans les faits , comme nous le voyons dans l'exemple de l'Irak que j'ai évoqué plus haut , il y a toutes sortes de dérapages, qu'il y a deux poids deux mesures quand on utilise des mots comme "réalisme", "pragmatisme", et d'autres mots comme "laïque" et "démocratie", qui nécessitent d'être complètement repensés et réévalués. La réalité est trop complexe et diverse pour se prêter à des formulations naïves comme "un Irak démocratique qui acceptera docilement nos voeux et désirs ". Une telle manière de raisonner ne peut pas passer le test de la réalité. Les significations ne sont pas imposées d'une culture à une autre pas plus qu'une langue et une culture ne possèdent à elles seules le secret de comment faire les choses efficacement. Selon moi, en tant qu'Arabes, et en tant que citoyens des Etats-Unis, nous avons trop longtemps permis qu'un petit nombre de slogans fortement claironnés à propos de "nous" et "notre" manière de faire remplacent la discussion, l'argumentation et l'échange. Un des échecs majeurs de la plupart des intellectuels arabes et occidentaux aujourd'hui, c'est qu'ils ont accepté sans débat ni examen rigoureux des mots comme laïcité et démocratie, comme si chacun savait ce que ces mots veulent dire. Les Etats-Unis ont aujourd'hui la population carcérale la plus nombreuse de tous les pays du monde. Ils connaissent également un plus grand nombre d'exécutions capitales qu'aucun autre pays du monde. Pour y être élu président, vous n'êtes pas obligé d'obtenir la majorité des voix, mais vous devez avoir dépensé plus de 200 millions de dollars. Comment ces choses-là passent-elles le test de la "démocratie libérale" ? Par conséquent, plutôt que de laisser s'organiser les termes du débat sans la dose nécessaire de scepticisme autour d'un petit nombre de concepts mal définis tels que "démocratie" et "libéralisme" ou encore autour de termes employés à tout va, sans examen sérieux, comme "terrorisme", "arriération" et "extrémisme", nous devrions exiger une sorte de discussion plus exigeante et astreignante qui voie les termes définis à partir de nombreux points de vue et replacés toujours dans leurs circonstances historiques. Le grand danger, c'est que la pensée "magique" américaine à la Wolfowitz, Cheney et Bush en vienne à passer pour le modèle suprême que tous les peuples et toutes les langues doivent copier. A mon avis, et si on considère l'Irak comme un exemple frappant, il ne faut pas permettre que cela ait lieu sans débat énergique et analyse approfondie, et nous ne devons pas nous laisser intimider au point de croire que le pouvoir de Washington est impressionnant au point d'être irrésistible. En ce qui concerne le Moyen-Orient, la discussion doit inclure Arabes et Musulmans et Israéliens et Juifs comme partenaires égaux. J'appelle chacun à participer et à ne pas laisser le domaine des valeurs, des définitions et des cultures sans contestation. Car ces domaines ne sont certainement pas la propriété de quelques officiels de Washington, pas plus qu'ils ne sont la responsabilité de quelques gouvernants du Moyen-Orient. Il y a là un domaine commun de projets humains en train d'être créé et recréé et aucunes foudres impériales ne pourront jamais cacher cela ou le nier. Haut de page Retour
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