Chili
Réunion d'«allegados» à Santiago
«La participation citoyenne» de Bachelet *
Au moment où l’ensemble des médias concentrent leur attention sur l’accession à la présidence de Michelle Bachelet, quelque 400 familles qui occupent des terrains dans la zone de peuplement Esperanza Andina – dans la municipalité de Penalolen [qui est intégrée dans la grande zone métropolitaine de Santiago] – étaient réprimées par les Forces spéciales de carabiniers du Chili. Des personnes furent arrêtées. Face aux menaces et à l’encerclement de la police, ainsi qu’à ses provocations, le groupe de familles pauvres évacua les terrains occupés et se réunit en une assemblée pour décider la prochaine étape de leur action. «C’est ainsi que commence la participation citoyenne du gouvernement de Bachelet», déclarèrent, indignés, les participants à cette occupation.
Durant la matinée du dimanche 12 mars, quelque 400 familles regroupant plus de 700 hommes, femmes et enfants organisèrent une occupation de terres dans la zone de peuplement Esperanza Andina [zone traditionnelle d’occupation de terres]. Les familles ont dénoncé le fait d’être «brutalement réprimées par des contingents de Forces spéciales de carabiniers, appuyées par des hélicoptères». Huit personnes furent arrêtées.
Les familles, réunies dans le mouvement des «Allegados en lutte de Penalolen» [allegados fait référence aux secteurs paupérisés qui luttent pour disposer d’un toit et de services minimaux: eau, électricité ; ce mouvement est large], menaient la lutte pour leurs droits depuis un certain temps ; elles organisaient des réunions et passaient des accords avec la municipalité et un service de l’Etat (Serviu [organisme dépendant du Ministère du logement et de l’urbanisme]) pour trouver des solutions au problème qu’elles rencontrent pour faire face à l’accès à la terre et au paiement élevé pour l’obtention des services de base. «Nous avons répondu à toutes les requêtes et effectué les démarches pour s’inscrire et disposer des sommes exigées par le Serviu, disent-elles, cela afin de recevoir un subside pour le logement. Mais les autorités font la démonstration que malgré tous nos efforts elles ne sont pas sensibles à notre situation.»
La grande majorité des habitants de Penalolen sont nés ici au même titre que leurs pères et leurs aïeux. Ils ont occupé ces terres en combattant pour avoir un toit, en s’efforçant de faire progresser la zone de peuplement. Mais aujourd’hui la valeur des terrains de la municipalité a tellement grimpé que tous les «allegados» se voient obligés d’abandonner Penalolen s’ils veulent obtenir un logement en propre. Dans ce sens, il y a des milliers de familles qui ont été repoussées à la périphérie de la zone métropolitaine dans des lieux où il n’y a ni emplois, ni services de base, ni hôpitaux, ni écoles…
«Nous voulons que notre revendication soit prise en compte, ne serait-ce que parce qu’à Penalolen actuellement il y a plus de 18'000 «allegados» qui n’ont reçu aucune réponse à leurs revendications, alors que sur le territoire municipal il existe plus de 150 hectares disponibles pour la construction de logements sociaux», nous disent-ils.
Les familles disent que tout ce qui est arrivé pourrait être évité grâce à la construction de logements sociaux par la commune, mais que cela va à l’encontre de la volonté du maire de la municipalité, Claudio Orrego, et du Serviu.
Ils nous disent: «Aujourd’hui, ce qui est clair, c’est que la politique présente du logement ne résout pas le problème de milliers et milliers de Chiliens ; dès lors, elle est profondément antidémocratique et elle ne s’inscrit en rien dans la perspective de construire un ‘Chili avec l’égalité’ [slogan de la campagne de M. Bachelet]. Cette politique discrimine les plus pauvres, nous rejette à la périphérie de Santiago et cela n’est pas démocratique.»
Le même mais avec une couleur différente
Le mouvement affirme que la politique répressive qu’ils ont connue lors des dernières semaines du gouvernement de Ricardo Lagos [social-démocrate prédécesseur de Bachelet] se perpétue aujourd’hui avec la présidence de Bachelet.
«Notre région de Penalolen est totalement contrôlée par les Forces spéciales de carabiniers», disent-ils. «Cette présence massive des forces de l’ordre, qui l’ordonne ? Au cours de la nuit ou à l’aube, on peut écouter les sirènes des voitures de police, ce qui nous rappelle un sombre passé récent. Il y a un fort contingent féminin membre des Forces spéciales et de nombreux véhicules pour des opérations de répression sont exhibés devant la caserne des carabiniers de Penalolen.»
«Nous savons que les carabiniers du Chili n’agissent pas seuls ; il y a des ordres qui émanent des autorités centrales de l’Etat chilien et qui sont en accord complice avec le gouvernement local dirigé par Orrego. Dans la mesure où nous savons qu’il existe une grande quantité de Carabiniers sans logement [Carabineros Sin Casa], nous signalons, sur ce point, que nous ne considérons pas les carabiniers comme nos ennemis», ajoutent-ils.
Après avoir occupé les terres et y être resté un temps significatif, alors que les Forces spéciales de carabiniers provoquaient, surveillaient, menaçaient constamment les 400 familles qui agissaient de manière pacifique, ces dernières ont décidé, comme nous l’avons indiqué, de les quitter face au danger que représentaient les forces de police qui augmentaient en nombre. Le mouvement s’est déclaré en situation «d’assemblée ouverte».
Le campement de Nassur
Près de la zone dont nous avons parlé, une occupation de terres a eu lieu, le campement de Nassur. Il a été aussi l’objet d’une surveillance permanente de la part des Forces spéciales, utilisant des hélicoptères, tout cela visant à provoquer les habitants.
Les membres du mouvement des Allegados en lutte de Penalolen nous expliquent: «Les allegados qui ne sont pas membres de campement Nassur ne prendront jamais une initiative pour que la solution trouvée par nos frères de ce campement soit affaiblie. Nous avons toujours admiré nos frères de Nassur et leur courageuse décision d’occuper des terres. Nos chemins se croisent.» Cette déclaration va à l’encontre des bruits que font courir les forces de police sur les préjudices possibles que le mouvement des Allegados en lutte de Penalolen pourrait faire peser sur les populations paupérisées déjà installées. C’est une claire et classique manœuvre policière visant à fragmenter le mouvement.
(Traduit par la rédaction de «à l’encontre.)
* Cet article a été rédigé par l’Agencia de noticias red acction, Chili. Pour plus d’informations, voir les sites liberacion.cl et pobladoresaluchar.8m.net.
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