Brésil
Palocci, le ministre
PT de l'économie symbole du social-libéralisme
Prise
de position de Liberté Rouge
Fraction publique de Démocratie socialiste (DS), tendance interne du PT
Nous
publions ci-dessous la déclaration, écrite fin mars et
publiée fin avril, de la fraction publique du courant
Démocratie socialiste, courant interne au PT et affilié
à la IVe Internationale Secrétariat unifié.
Cette fraction a à sa tête l'un des créateurs du
courant Démocratie socialiste Joao Machado et la
sénatrice
de l'Etat d'Alagoas (Nord-Est) Heloisa Helena. Cette dernière
est la principale figure du mouvement pour un nouveau parti
socialiste et démocratique qui tiendra sa réunion
constitutive les 5 et 6 juin 2004 à Brasilia.
La
démarche de la fraction publique de la DS, Liberté
Rouge, doit être mise en relation avec la participation à
un poste éminemment sensible, celui de la réforme
agraire, d'un membre de la DS: Miguel Rossetto. Ce dernier a
jusqu'à
maintenant reçu l'appui complet et entier de la tendance
Démocratie socialiste, quand bien même le processus de
réforme agraire du gouvernement Lula non seulement n'a
strictement rien à voir avec le plan initial proposé
par la commission placée sous la direction de Plinio Arruda
Sampaio, mais avec les objectifs restreints annoncés par le
gouvernement Lula lors de son entrée en fonctions. De plus,
toute la politique agraire se trouve soumise aux lignes directrices
imposées par le ministre de l'Agriculture et l'orientation
générale de stimuler l'agro-exportation comme
principale source de devises pour faire face aux
échéances
du service de la dette. Cette
déclaration de la fraction Liberté Rouge de la DS
acquiert aussi son importance lorsqu'on la place dans une perspective
à moyen terme. Ainsi, en 2000, dans un ouvrage collectif
intitulé «Le siècle des communismes»,
ouvrage réédité en janvier 2003 en livre de
poche, coll. Point, Le Seuil, Michaël Löwy
écrivait: «La tendance Démocratie socialiste du
PT
brésilien
- liée à la IVe Internationale - exerce une réelle
influence, avec plusieurs députés, sénateurs et
maires. On observe dans certains documents du PT - comme celui sur le
socialisme, approuvé en 1990 - une certaine influence des
idées du courant trotskiste» (p. 686, éd.
2004). Il
est possible que cette influence ait existé dans un texte. Il
est certain que le courant Démocratie socialiste a
disposé
de plus en plus de positions institutionnelles, à tel point
que l'essentiel de ses membres avaient des responsabilités
soit dans l'appareil du PT, soit dans les diverses administrations
municipales et étatiques, et depuis 2002 au niveau de l'Etat
fédéral et du gouvernement. Toutefois, il est encore
plus évident que dès 1994, suite à la
défaite
électorale du PT, qui alors était dirigé par une
coalition de gauche, un processus d'institutionnalisation et de
droitisation du PT est allé s'accélérant.
Dès
avant l'élection de Lula, divers organismes avaient
été
mis en place - par exemple, l'Institut de la citoyenneté -
pour prendre le contrôle de la campagne électorale de
Lula afin de distiller une ligne s'imposant de fait au PT (ligne qui
ressortait bien dans le document de Lula intitulé «Lettre
aux Brésiliens»), pour tisser des alliances avec la
droite avant même les élections de 2002. La
participation d'un membre de la DS dans le gouvernement Lula avait
pour fonction, prioritaire, de freiner les oppositions au sein du PT.
En ce sens, comme le fait Emir Sader, il n'est pas erroné d'affirmer: «Les tendances de gauche du PT ont
facilité
la tâche de neutralisation du parti [par le PT
gouvernemental] en les intégrant pratiquement toutes
à
des postes dans le gouvernement et, dans ces conditions, en les
rendant complices silencieuses des actions du gouvernement.
Pratiquement aucune tendance ne s'est refusée à
participer au gouvernement... Elles se sont rendues ainsi incapables
d'être des expressions politiques du mécontentement
d'une grande partie des militants et du mouvement social
organisé.» («Le PT et le gouvernement Lula, 2
mai 2004) Certaines
analogies rapides ont été faites entre ce tournant du
PT et l'institutionnalisation de la social-démocratie
après
sa première phase historique. César Benjamin - un des
créateurs du PT, sorti en 1995 et animateur de divers
mouvements sociaux - ne manque pas de souligner l'inadéquation
de cette analogie: «A diverses reprises, des personnes
comparent le PT avec la social-démocratie, dans un sens
péjoratif. Je considère injuste cette comparaison parce
que la social-démocratie fut un mouvement sérieux ayant
une base ouvrière importante et organisée, qui a
mené
de nombreuses luttes et obtenu des conquêtes pour sa base
sociale. C'est dans ce contexte de gains obtenus qu'elle a
négocié
son maintien dans le système capitaliste. Le PT adhère
au système sans rien obtenir pour la classe ouvrière.
C'est un processus d'accommodement avec le système qui est
différent et pire que celui de la social-démocratie,
sans aucun pacte social clair qui le légitime. Le PT s'est
transformé en un instrument d'ascension sociale pour sa propre
bureaucratie. De très nombreuses personnes [membres du PT] ne
conçoivent et n'imaginent pas revenir à
leur
bureau de travail, à leur entreprise, à leur lieu
d'enseignement ou à l'hôpital. Ils ne savent plus ce que
c'est faire les comptes à la fin du mois, ils ne savent plus
ce qu'est la menace du chômage. Ce personnel [politique du
PT] a commencé à vivre dans un autre monde. Lors du
dernier congrès du PT, la vaste majorité des
délégués
était formée par des fonctionnaires du propre PT.» (As transformaçoes do PT e os rumos da esquerda no Brasil,
coord. Felipe Demier, Ed. Bom Texto, 2003) Dans
de nombreuses études, des constats identiques existaient. Les
faire après 17 mois de gouvernement Lula est un progrès.
Les avoir faites avant et en avoir tiré les
conséquences
auraient permis certainement de faire face avec plus de forces à la politique du gouvernement Lula et du PT gouvernemental.
Aujourd'hui,
nous sommes à la veille du congrès fondateur du nouveau
parti. Le défi est énorme. S'il n'est pas relevé,
le risque d'une expérience gouvernementale du PT qui se
termine par une fragmentation de la gauche socialiste et
révolutionnaire est grand. - cau
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1) Sur le caractère du gouvernement Lula
Si immédiatement après la prise de fonctions de Lula, il y
avait des doutes sur le caractère que prendrait son
gouvernement, ce caractère est aujourd’hui très
clair.
Il est un fait que le gouvernement est traversé de nombreuses
contradictions et connaît de vifs conflits internes, dont
certains sont très importants (par exemple, en ce qui concerne
les négociations de l’ALCA - initiales en portugais et
espagnol de la ZLEA, Zone de libre-échange des Amériques
- et la réalisation de la promesse de réforme agraire).
Mais il y a une orientation générale claire -
exprimée
dans la politique économique et dans la politique d’alliances
- et les caractéristiques conservatrices de l’une et de
l’autre ont été largement renforcées. Le
gouvernement Lula a une orientation générale
néolibérale, ou social-libérale si l’on
considère qu’il applique une politique néolibérale
en s’appuyant sur un parti de tradition socialiste. C’est
un gouvernement de collaboration de classes, qui subordonne les
intérêts populaires à une alliance
privilégiée
avec la bourgeoisie, tant brésilienne qu’impérialiste.
Même
si les secteurs critiques de l’ALCA à l’intérieur
du gouvernement venaient à empêcher sa mise en
application (en promouvant toutefois le projet dit de «ALCA
light», au lieu de le rejeter), et même si les secteurs
favorables à la réforme agraire parvenaient à
concrétiser le PNRA (Plan national de réforme agraire)
qui a été prévu (et qui représente
beaucoup moins que ce que revendiquaient les mouvements paysanas),
l’orientation générale de la politique économique
ne sera pas altérée. Et cela ne sera pas non plus
suffisant pour inverser la logique de subordination des
intérêts
populaires à l’alliance large constituée avec les
secteurs bourgeois. Les
conflits à l’intérieur du noyau central du
gouvernement ne remettent pas en cause la politique économique
néolibérale, ni les larges alliances avec de nombreux
secteurs bourgeois, qui garantissent que le gouvernement défend
leurs intérêts historiques. Le noyau central du
gouvernement est beaucoup plus proche des ministres conservateurs et
bourgeois (Palocci [finances] – membre de ce même noyau –
et son équipe, Rodrigues [agriculture], Furlan [industrie])
que de ministres tels que Miguel Rossetto [réforme agraire] ou
Marina Silva [environnement]). Le
rôle de ces derniers est clairement limité et
subordonné. Ils ont été choisis (et sont
maintenus à leur poste) comme une concession à la base
sociale traditionnelle du PT, afin d’éviter qu’elle
ne passe en totalité dans l’opposition. Le fait qu’ils
restent au gouvernement remplit une fonction de légitimation,
face aux différents secteurs de la population, de
l’orientation générale conservatrice du
gouvernement; cela a aidé la politique générale
du gouvernement consistant à démobiliser et à
intégrer les mouvements sociaux. En
général, il est commun d’estimer que Itamary
[allusion au palais du Ministère des affaires
étrangères]
est le ministère qui se rapproche le plus de la ligne
défendue
par le PT dans sa campagne électorale, et qui se
différencie
le plus de la ligne du gouvernement de F. H. Cardoso. Il nous est
toutefois impossible de ne pas relever, à l’inverse, le
fait qu’il soit en train de mener une politique conservatrice
et inacceptable, de collaboration avec les Etats-Unis, à
travers la participation [de troupes brésiliennes] à
l’occupation militaire de Haïti. Le
gouvernement n’a pratiquement pas d’opposition sur sa
droite parce qu’il met en pratique, pour l’essentiel, le
programme de la droite. De fait, les initiatives politiques centrales
du gouvernement de Lula perpétuent et approfondissent les
projets antérieurs du gouvernement de F. H. Cardoso, suivent
le modèle du FMI et de la Banque mondiale, et visent
principalement à satisfaire les marchés financiers.
Fabio Konder Comparato a attiré l’attention (en
répondant au journaliste Elio Gaspari dans Folha de Sao
Paulo) sur la «ruine morale» du gouvernement de
Lula. Qu’il ait raison ne fait aucun doute. Le problème
n’est pas tant dans ce qui renvoie aux diverses informations
sur la mauvaise conduite de membres du gouvernement ou de gens qui se
sont associés au PT au moment où il accédait au
pouvoir, particulièrement depuis «l’affaire
Waldomiro Diniz» [scandale de corruption avec les mafias du
jeu illégal]. Mais le problème va, bien entendu, bien
au-delà des révélations du caractère
corrompu de cet ex-ami intime et conseiller du ministre Dirceu
[responsable de la «Maison civile», établissant
le lien direct entre la présidence et le gouvernement]. De
fait, cela éclaire sur les méthodes utilisées
par le gouvernement pour construire sa majorité parlementaire,
et sur la nature de cette majorité [la pratique d'acheter des
votes continue sous la présidence de Lula]. Mais
le plus grave est le terrible spectacle électoral qu’offrent
Lula et le gouvernement (avec le soutien de toute la direction du
«camp majoritaire» du PT), et en même temps la trahison
du programme historique du PT ainsi que des intérêts des
travailleurs et du peuple. Autrement dit, il s'agit du changement de
camp, dans la lutte de classes, de Lula et de ceux qui
définissent
avec lui la politique du gouvernement.
2) Sur le PT aujourd’hui
Depuis le début des années 1990, le PT a connu un processus de
distanciation par rapport à certains des traits les plus
importants qui le caractérisaient à ses débuts:
il est devenu progressivement un parti institutionnel, fonctionnant
presque totalement autour des batailles électorales, et a
progressivement perdu son caractère de parti militant. De
plus, une partie de sa direction montre, depuis, qu’elle s’est
distanciée de la perspective socialiste.
Cependant,
un conflit sur le cours du parti a existé pendant toutes ces
dernières années. Une grande partie des militants du
mouvement social qui ont constitué la base du parti a
continué
à s’identifier au socialisme. Dans les directions du PT,
les secteurs de gauche ont toujours lutté contre le processus
d’évolution régressive. Avec
la campagne électorale de 2002, et surtout les débuts
du gouvernement de Lula, en même temps que les espaces de
démocratie interne étaient radicalement réduits,
la perte de substance du PT en tant que parti socialiste a connu un
saut qualitatif et est devenue irréversible (ce qui est
vérifié par l’affiliation au parti de
personnalités clairement de droite, sans aucun lien avec la
plus petite tradition progressiste). Toute
la gestion de la réforme de la Prévoyance vieillesse
[contre-réforme des retraites] - comme d’autres
questions -, dans une claire absence de respect des décisions
des Rencontres [conférences nationales] du parti; le fait
d’avoir imposé aux groupes parlementaires du PT un rôle
de courroie de transmission des décisions du noyau central du
gouvernement; et enfin l’expulsion des parlementaires rebelles
[les quatre «radicaux» qui s’étaient
opposés à la contre-réforme des retraites], tout
cela constitue des manifestations de cette régression. Le
PT apporte un soutien inconditionnel à un gouvernement
social-libéral. Il est évident que la prochaine
Rencontre nationale du parti sera «gonflée»,
tant par l’afflux des nouveaux affiliés de droite que
par la manipulation par le gouvernement de nombreux adhérents.
Cette Rencontre ne sera pas démocratique. Même si dans
les rangs du PT il y a de nombreux militant.e.s des mouvements
sociaux et socialistes sincères, il n’existe pas de
possibilité que le PT se constitue en un instrument de lutte
capable de corriger le cours du gouvernement.
3) Sur l’impossibilité d’un changement de la nature
de classe du gouvernement Lula
Les conflits à l’intérieur du gouvernement, de par
leur nature telle qu’elle a été démontrée
jusqu’à présent, et du fait des rapports de
forces, ne peuvent pas mener à un changement fondamental
d’orientation. Etant donné le processus de
transformation que le PT a déjà connu et celui qu’il
connaît encore aujourd’hui, ainsi que les rapports de
force en son sein, il ne peut pas non plus constituer un instrument
de lutte pour un changement de l’orientation générale
du gouvernement.
Le mouvement social fait pression et cette pression tend à
augmenter. Mais il n’a pas la capacité d’influer
de façon décisive sur le cours du gouvernement. Ce
dernier s’est montré capable de coopter une partie des
mouvements sociaux et de neutraliser d’autres secteurs. La CUT
[Centrale unique des travailleurs, la confédération
syndicale majoritaire, créée par le PT], sans doute
l’organisation la plus influente dans l’ensemble du
mouvement social, a formulé des critiques envers certains
aspects de la politique du gouvernement. Mais ce qui a
prédominé
dans sa direction (et à partir de là, dans la pratique
de la centrale), c’est beaucoup plus la collaboration avec le
gouvernement qu’une lutte intransigeante pour défendre
les intérêts des travailleurs et travailleuses. Seuls
un développement explosif de l’insatisfaction et
l’éclatement d’une crise grave pourraient
provoquer un changement. Mais dans ce cas, il s’agirait d’un
processus dirigé contre le gouvernement Lula et contre la
direction du PT.
4) La nécessité pour la gauche socialiste de ne pas
participer au gouvernement
Le gouvernement Lula mène globalement une politique
néolibérale.
Il n’existe pas de possibilités de changer
qualitativement cette situation à partir des contradictions
internes du gouvernement, ou bien d’une pression du PT, ou
encore de celle des mouvements sociaux (du moins tant que cette
dernière ne franchira pas un seuil qualitatif en se
transformant en une mobilisation massive contre le gouvernement). De
plus, le gouvernement Lula ne cesse de demander à la
population de prendre patience. Il tente de la désinformer et
de la manipuler en usant des techniques les plus malhonnêtes de
propagande et de son influence sur les chaînes de
télévision
et la grande presse, etc. Son objectif est ainsi de démobiliser.
Ce gouvernement doit être caractérisé comme un
adversaire des travailleurs et des mouvements populaires. La
participation au gouvernement Lula s’oppose de plus en plus
frontalement à la défense des intérêts
populaires et du socialisme. La gauche du PT (et d’autres
partis) se trouve confrontée à la nécessité
toujours plus aiguë de rompre avec ce gouvernement. Les
ministres qui veulent maintenir avec cohérence leur condition
de militants de gauche, de socialistes, doivent quitter le
gouvernement.
5) Sur la nécessité de construire une alternative
La
seule alternative [constituée en parti] existant aujourd’hui
à la gauche du PT – celle du PSTU [Parti socialiste des
travailleurs unifié, organisation trotskiste] – n’a
pas la capacité de s’ériger en alternative au PT
pour se transformer en une référence suffisamment forte
pour attirer les militants qui perdent leurs illusions dans le
gouvernement Lula. Il
est donc nécessaire de construire un nouvel outil politique
qui récupère la perspective militante et socialiste
abandonnée par le PT ; qui puisse constituer une alternative
pour les militants et les secteurs sociaux qui perdent leurs
illusions dans le PT (et pour ceux des autres partis de gauche
soutenant le gouvernement Lula) ; c’est-à-dire un parti
qui ait pour vocation d’unifier toute la gauche socialiste. Si
un tel parti ne voyait pas le jour, tout le potentiel accumulé
par la construction du PT pendant plus de vingt ans (de sa fondation
jusqu’aux élections de 2002, malgré les problèmes
qui ont été croissants lors des dernières
années), serait perdu. Ce
parti ne pourra pas se limiter à répéter ce que
le PT a fait durant ses premières années. Cette
tradition sera une référence centrale, importante pour
disputer l’héritage du PT. Mais il sera nécessaire
de tirer le bilan de la trajectoire du PT, d’évaluer ce
qui a été erroné, d’identifier les erreurs
commises. Nous voulons apprendre des erreurs du PT, tout comme des
acquis de son histoire, et aller au-delà. Il
faudra prendre en considération ce qui a changé dans le
monde et au Brésil. Et sur cette base, reposer
l’actualité
du socialisme. Incorporer le nouvel internationalisme qui se
développe dans la lutte contre la mondialisation
néolibérale
exigera une attention particulière. Une échéance doit nécessairement être prise en
compte pour la construction de cette alternative: celle des
élections [présidentielles] de 2006. Si un parti
socialiste ne doit pas centrer son activité sur les batailles
électorales, il ne peut pas non plus les déserter.
Aujourd’hui, la nature du gouvernement Lula et les décisions
prises en vue de la campagne électorale de 2006 (notamment
l’alliance du PT avec le PMDB - Parti du mouvement démocratique
du Brésil, important parti bourgeois et le plus ancien dans le
pays - et la quasi-totalité des partis de droite) font qu’il
sera totalement impossible pour la gauche socialiste de soutenir une
nouvelle fois la candidature de Lula. Il
sera dès lors essentiel pour la gauche socialiste de
participer aux élections de 2006, afin de dénoncer la
trahison des intérêts populaires par le gouvernement
Lula et de montrer qu’il existe une alternative au
néolibéralisme et au système capitaliste. Notre
participation à la campagne électorale devra être
cohérente avec notre défense du socialisme comme
alternative politique et notre conviction qu’une société
fondée sur l’égalité sociale, humainement
différente et totalement libre, est possible. C’est
pourquoi il sera nécessaire de créer les conditions
afin de présenter une candidature propre. Pour
toutes ces raisons, nous participons à la construction d’un
nouveau parti socialiste au Brésil, à travers le
Mouvement de la gauche socialiste et démocratique, lancé le 19 janvier avec un document ayant pour titre: Mouvement pour un
nouveau parti. Pour une gauche socialiste et démocratique . A
travers ce mouvement, en respectant les expériences et
trajectoires très diverses existant en son sein, nous luttons
pour la construction d’un parti démocratique et
militant, mais surtout de classe, anticapitaliste,
anti-impérialiste,
socialiste et internationaliste, constitué par tous les
secteurs de la classe des travailleurs. Pour un parti qui assume la
lutte pour la libération des femmes, le combat contre toutes
les formes de discrimination raciale, la fin de l’oppression
des GLBT [gays-lesbiennes-bis-trans] et la lutte pour un
environnement réellement soutenable (impossible dans le cadre
du capitalisme), en tant que piliers sans lesquels nous ne
parviendrons pas à nous opposer à la dynamique du
système. La
gauche socialiste et démocratique est confrontée dans
notre pays au défi consistant à construire un nouveau
parti politique qui rejette une construction commune avec la
bourgeoisie, un parti qui non seulement s’affronte aux
politiques néolibérales mais remette en cause la
légitimité du système capitaliste ; un parti qui
défende les mobilisations sociales et l’auto-organisation
démocratique des travailleurs.
6)
Nous sommes des militants de la DS et de la Quatrième
Internationale
Les
résolutions de la Septième Conférence nationale
de la DS, réalisée en novembre 2003, ont eu des
limites, en ce sens qu’un choix global a été fait
de restreindre la portée du débat afin de rechercher
l’accord le plus large possible. Malgré ces limites, la
conférence a tiré un bilan très critique des 11
premiers mois du gouvernement Lula et de la situation du PT à
la fin 2003. Nous avions alors pointé le fait que
l’orientation économique du gouvernement Lula était
conservatrice et néolibérale, qu’elle
conditionnait toute l’activité du gouvernement, et que
la politique d’alliances stratégiques avec des partis
bourgeois, tout comme l’entrée dans le PT de
personnalités n’ayant rien à voir avec un parti
de gauche, faisaient perdre au PT son caractère de parti
socialiste et menaçaient gravement tout son projet historique.
Nous avions en outre souligné la réduction drastique
des espaces de démocratie au sein du PT, ainsi que sa
transformation en courroie de transmission des décisions du
gouvernement, en particulier les décisions les plus
impopulaires.
Dans
les mois qui ont suivi cette conférence, toutes les
caractéristiques négatives du gouvernement et du PT se
sont aggravées. En
premier lieu, l’expulsion annoncée des parlementaires
rebelles, contre laquelle nous avons lutté et que la
conférence a déclarée totalement inacceptable,
est devenue effective. Cela, malgré un large mouvement de
solidarité avec les parlementaires menacés,
développé
au Brésil et à l’échelle internationale,
où dans ce dernier cas le mouvement a été
impulsé par des camarades de la Quatrième
Internationale. Deuxièmement,
l’alliance conservatrice avec des partis bourgeois, avec y
compris les prémisses d’une alliance pour les élections
de 2006, prévoyant le PMDB à la vice-présidence,
s’est renforcée. Troisièmement,
la politique économique conservatrice et
néolibérale
- louée et citée en exemple par Anne Krueger,
représentante de la ligne la plus dure du FMI et du
gouvernement Bush, parmi de nombreux autres porte-parole de la droite
la plus réactionnaire - a été consolidée
et renforcée. Cette consolidation conservatrice se traduit
maintenant par une nouvelle réduction brutale des ressources
budgétaires. Ses conséquences anti-populaires
deviennent encore plus évidentes que lors des premiers mois de
2004. Quatrièmement,
depuis le «scandale Waldomiro Diniz», les méthodes
politiques consistant à former des majorités
parlementaires au moyen de l’argent, d’autres avantages,
de pots-de-vin, et en répondant à des
intérêts
distincts de l’intérêt public, sont devenues
beaucoup plus évidentes. Face à l’expulsion d’une
camarade de la DS, la sénatrice Heloísa Helena, un
groupe de militants de la DS s’est désaffilié du
PT puis a participé, avec la camarade, au lancement du
mouvement pour un nouveau parti politique. Nous
estimons que dans la situation actuelle, la décision de
participer au mouvement pour un nouveau parti politique ne place pas
ceux qui l’ont prise en dehors du cadre programmatique de la DS
et de la Quatrième Internationale. Au
contraire, cette participation est parfaitement cohérente avec
ce cadre. Nous avons une tactique de construction différente
de celle qui a été adoptée par la majorité
des camarades de la DS. Cette existence de tactiques de construction
différentes n’est, de façon générale,
pas souhaitable ; il s’agit dans notre histoire d’une
situation exceptionnelle. Nous y avons été contraints
du fait des transformations brusques du cadre de la lutte de classes
au Brésil, et tout particulièrement du changement de
camp, dans cette lutte, décidé par la direction du PT
qui s’est placée au service des intérêts du
capital financier. Les militants de la DS qui participent au
mouvement pour un nouveau parti ne peuvent pas répondre
positivement à l’appel à ce qu’ils se
ré-affilient au PT voté par la majorité de la
direction de la DS.
La Septième Conférence nationale de la DS n’a pas
décidé d’initier un mouvement pour un nouveau
parti. Elle a cependant souligné la nécessité de
renforcer la lutte contre les orientations néolibérales
du gouvernement Lula et de la majorité de la direction du PT.
Nous estimons que, vu l’accélération des
événements provoquée par l’expulsion des
camarades du PT, ainsi que le durcissement conservateur des positions
du gouvernement Lula, notre position peut être comprise comme
un dédoublement légitime des résolutions de la
conférence.
7)
Pour les camarades qui continuent la lutte à l’intérieur
du PT Nous
ne pouvons pas ne pas remarquer que la majorité de la
direction de la DS agit à contresens de la dispute sur les
orientations [du gouvernement et du PT] décidée lors de
la dernière conférence de la DS. La
position que la direction majoritaire de la DS a prise lors de
l’épisode du «scandale Waldomiro», de
défense des positions du gouvernement et de la direction du
PT, en s’opposant à l’installation d’une
commission parlementaire d’enquête et d’une
commission parlementaire de suivi des investigations, ainsi que le
fait de ne pas avoir soutenu le séminaire «Nous voulons
un autre Brésil» [séminaire réunissant des
membres dits critiques du PT] sont incompréhensibles. De
fait, la majorité de la direction de la DS n’a pas mené
une lutte sur le cours du PT et du gouvernement en conformité
avec ce qui a été décidé dans notre
Septième Conférence. Plus qu’une lutte claire
contre les positions du «camp majoritaire» du PT, ainsi
que cela a été défini par les résolutions
de la conférence, ce qui prévaut est une attitude de
collaboration avec l’ensemble de la direction du PT,
c’est-à-dire avec le «camp majoritaire». Cette
attitude de la majorité de la direction de la DS met
sérieusement en danger notre tendance. Si la DS connaissait
déjà de fortes tensions internes, au moins depuis
l’expulsion du PT de la camarade Heloísa Helena, la
nouvelle position assumée par la majorité de la
direction de notre courant menace de conduire à un processus
de déchirement similaire à celui qu’ont connu
d’autres courants de la gauche du PT. Nous sommes favorables à
la convergence de la gauche socialiste du PT [cette gauche qui s'est
réunie lors du séminaire «Nous voulons un autre
Brésil»] et du Mouvement de la Gauche socialiste et
démocratique [qui est en voie de construire un nouveau parti]. Nous
lutterons pour garantir qu’il y ait des relations fraternelles
entre ces deux secteurs, entre lesquels se divise aujourd’hui
la majeure partie de la gauche socialiste brésilienne –
tout particulièrement parmi les militants de la DS qui se
trouvent d’un côté et de l’autre.
Signataires: Ana Sílvia Laurindo Da Cruz, Anderson Mancuso, Bruno
Velasco, Carlos Alberto Almeida, Daniel Velasco, Francisco Conte,
Heloísa Helena, João Machado, Luciana Sá,
Luciano Da Silva Barbosa, Luiz Delmiro Texeira, Luiz Felipe,
Mário
Agra, Nilo Aragão, Pérola Engelaum, Reginaldo Costa Haut de
page
case postale 120, 1000 Lausanne 20
fax +4121 621 89 88
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