Brésil


Lula présente une oeuvre faite avec du papier
recyclé recueilli par des "ramasseurs de papier" de grandes ville
(23 décembre 2003)

FMI: le gouvernement Lula ne dépense pas la totalité
du «fonds de lutte contre la pauvreté»*

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L'article que nous publions ci-dessous résume bien, sous l'angle économique et politique, l'orientation du gouvernement bourgeois de Lula reposant sur un accord avec un secteur clé du capital et de la bourgeoisie brésilienne et étayé par des accords avec les institutions financières internationales.

Dans la Folha de Sao Paulo (online) du 26.12.2003, il est indiqué que le président Lula propose un poste au dirigeant du PMDB à la Chambre des députés, Eunicio Oliveira (Etat de Ceara - Nord-Est, dont la capitale est Fortaleza). D'autres candidats sont envisagés, issus des rangs du PMDB et d'autres forces, pour un second ministère. Les ministères envisagés ne sont pas secondaires puisqu'il s'agit de ceux de la Ville, des Sciences et technologies et des Transports. Ces deux derniers intéressent particulièrement les transnationales pour ce qui a trait aux investissements et aussi à la propriété intellectuelle, qui est une source de plus en plus importante de la rente que s'attribuent les pays impérialistes dans leurs relations de domination avec les pays de ladite périphérie. Le Ministère des transports a été une place forte du PMDB sous le gouvernement Fernando Henrique Cardoso. Les luttes d'influence et les alliances vont se développer dans les jours qui viennent. Et le vice-président de la république, l'industriel José Alencar, aura aussi son mot à dire.

La reconfiguration des alliances dans le cercle gouvernemental promet un renforcement du cours actuel du gouvernement Lula.

Les membres du PT ayant des charges de maire de ville essaient de soutenir le «petiste» Olivio Dutra, actuel ministre de la Ville. Cela d'autant plus que l'année 2004 sera marquée par les élections municipales. Des décisions de ce ministère en faveur de mairies PT et de mairies des partis alliés gouvernementaux pourraient faciliter le jeu politico-clientélaire des candidats du PT.

Les annonces d'augmentation des dépenses sociales concernant la santé doivent simplement être replacées dans le cadre des réductions budgétaires dans le secteur de la santé depuis les années 1990. Le système de santé brésilien est emblématique d'un système à deux si ce n'est à plusieurs vitesses, et les deux tiers de la population doivent utiliser le système unique de santé sous-financé. En 1997, pour pallier la baisse des dépenses de santé, le gouvernement de Fernando Henrique Cardoso avait introduit une contribution provisoire sur les mouvements financiers qui a atteint un taux de 0,38%. Ainsi, lorsqu'un paiement par chèque était effectué, un impôt était perçu sur le montant en question. Cette réforme, comme beaucoup d'autres, n'a pas été appliquée dans le but proclamé. Les fonds récoltés n'ont donc pas été destinés au Ministère de la santé. Puis, FHC a redescendu le taux de 0,38% à 0,30% (initialement, il était de 0,20%). Cette contribution provisoire (CPMF), fortement critiquée par le PT, a été maintenue par ce dernier. Dès lors, les faibles réattributions de fonds au système de santé ne représentent même pas un réel rattrapage des restrictions budgétaires de la décennie 1990 et début 2000.

Il sera captivant, pour ceux qui suivent les développements politiques au Brésil, de prendre connaissance du contenu effectif de la recomposition du gouvernement. Ils pourront, dès le 15 janvier 2004, ou peut-être un peu plus tard, savoir si la bataille pour défendre la présence d'Olivio Dutra au Ministère de la ville sera marquée par une victoire. Ils auront aussi l'aubaine de découvrir si la gauche du PT, au sein de laquelle le courant Démocratie socialiste (DS) joue un rôle significatif, va se mobiliser pour que son ministre, Miguel Rossetto, en charge du Développement agraire (réforme agraire), puisse exprimer une orientation casanière. C'est-à-dire cette attitude qui correspond à ce goût si vite appris de rester dans un logis gouvernemental, quand bien même la gérance de l'immeuble est dénoncée comme fort peu respectueuse des véritables locataires du pays. Cela, à tel point que cette gérance n'a pas hésité à expulser quatre parlementaires - dont Heloisa Helena, membre de la DS - du PT, et antérieurement de la fraction parlementaire, simplement parce que ces parlementaires pensaient avec naïveté que les propositions historiques du PT restaient toujours valables pour répondre aux besoins les plus immédiats de la majorité de la population, dont une partie considérable vit une expérience casanière... dans des favelas. cau

Le gouvernement brésilien à la tête duquel se trouve le président Luiz Inacio Lula da Siva a conservé sans dépenser, au cours de l'année 2003, un quart des ressources du «fonds de combat et d'éradication de la pauvreté» disponible pour financer les programmes sociaux. Ce choix a été fait afin d'atteindre les objectifs d'ajustement budgétaire qui ont été concoctés avec le Fonds monétaire international (FMI), selon une information publiée aujourd'hui [le 25 décembre] dans le quotidien Folha de Sao Paulo.[Le gouvernement brésilien a accepté, sur conseil du FMI, l'objectif d'avoir un excédent budgétaire primaire, c'est-à-dire avant paiement des intérêts de la dette, à hauteur de 4,25% du PIB; le FMI exigeait moins; le gouvernement Lula a de fait dépassé cet objectif de 4,25%. Cela rassure les spéculateurs internationaux qui cherchent des segments de placements sûrs et rentables... qui leur sont payés au moyen de la fiscalité indirecte et grâce à la réduction des dépenses sociales par l'ensemble des salariés et des masses paupérisées.]

En outre, la presse locale [brésilienne] révèle que Lula mettra en marche en janvier 2004 sa première réforme gouvernementale destinée à inclure dans le gouvernement les centristes du Parti du mouvement démocratique brésilien (PMDB). [Le PMDB a été fondé en 1980 pour remplacer l'ancien MDB. Tancredo de Almeida Neves, le président durant deux mois, en 1985, de la transition de la dictature à la démocratie oligarchique, était un membre du MDB, puis du PMDB. Il avait été choisi en février 1982 comme vice-président du PMDB. Tancredo Neves fut choisi par les militaires, dès 1983, alors qu'il était gouverneur de l'Etat du Minas Gerais, pour organiser la transition. Malade, il dut renoncer très rapidement à sa charge présidentielle et lui succéda José Sarney Costa. Conclusion: le PMDB est une formation politique bourgeoise qui a joué et joue un rôle des plus significatifs.]

Selon le quotidien Estato de Sao Paulo, Lula devrait annoncer le 15 janvier la composition de son nouveau cabinet, avec au moins deux membres du PMDB; un parti qui dispose de 78 représentants à la Chambre basse et qui a été vital pour assurer l'acceptation de l'amendement constitutionnel fort débattu de la réforme du système de retraite concernant les fonctionnaires [une réforme combattue par les quatre parlementaires exclus, dont la sénatrice Heloisa Helena], réforme qui a éliminé diverses prestations allouées aux fonctionnaires.

La presse affirme que Lula a offert au PMDB deux ministères: celui de la Communication et celui de la Ville [actuellement attribué à Olivio Dutra]. Mais les dirigeants du PMDB revendiquent aussi la direction d'un troisième ministère.

De son côté, la Folha de Sao Paulorévèle que sur les plus de 700 millions de dollars disponibles cette année pour combattre la pauvreté, quelque 430 millions n'ont pas été utilisés afin de permettre d'atteindre, avec y compris un surplus, l'objectif de l'excédent primaire fixé à hauteur de 4,25% du PIB tel que convenu dans le programme d'ajustement budgétaire passé avec le FMI.

Dans l'immédiat, le gouvernement a obtenu que soit approuvé par le législatif son budget 2004, au moyen duquel il se propose de compenser le manque d'investissements sociaux en 2003; une année de stagnation économique et de coupes budgétaires qu'il attribue à l'administration antérieure de Fernando Henrique Cardoso.

Le projet de budget, approuvé en dernière heure de session, le mardi 23 décembre, au cours d'une session conjointe des deux Chambres législatives [Chambre des députés et Sénat], prévoit des entrées en faveur de l'Etat fédéral de l'ordre de 413,5 milliards de reals [soit quelque 142,5 milliards de dollars; pour rappel, la population brésilienne est estimée en 2003 à quelque 178,5 millions]. De cette somme, 12 milliards de reals seront destinés à des investissements dits sociaux, un chiffre trois fois supérieur à celui de l'année 2003 [en 2002, selon la Conférence nationale des évêques, 55 millions de personnes souffraient de la faim].

Dans les secteurs sociaux, celui de la santé bénéficiera le plus de la croissance des investissements sociaux, avec une allocation supplémentaire de 414 millions de dollars, par rapport à 2003. En outre, le salaire minimum mensuel sera augmenté; il pourrait passer à 279 reals contre 240 aujourd'hui (de presque 83 dollars à quelque 93 dollars) [Le salaire minimum n'est pas respecté pour une part extrêmement importante des travailleuses et travailleurs; de plus, un des traits spécifiques du processus de pauvreté, c'est-à-dire de surexploitation, est lié, d'un côté, à la tendance à une homogénéisation à l'échelle mondialisée des prix des biens de consommation durables et même alimentaires et, de l'autre côté, à un différentiel salarial extrêmement accentué, comme l'indiquent les chiffres cités ici.]

* Article publié dans l'excellent quotidien mexicain La Jordana, 25 décembre 2003, auquel collabore une grande partie des intellectuels et chercheurs mexicains qui ne sont pas aux ordres du PAN (parti du gouvernement) ou de l'ancien PRI.

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