Le 15 décembre 2003, le président Lula et le vice-président Alencar (représentant du grand Capital)
fêtent les reines de la Fête du raisin. Un jour avant, la Direction nationale du PT
expulsait Heloisa Helena, Luciana Genro, Joao Fontes et Baba...
Le PT décide d'expulser quatre de ses parlementaires
Nous publions ci-dessous la traduction de la prise de position de la direction du Parti des travailleurs ayant trait à l'expulsion de trois députés et d'une sénatrice, telle qu'elle a été mise à disposition de ses membres et des Brésiliens et Brésiliennes dans un communiqué (sous la rubrique Noticias du site du PT). Ce communiqué est censé présenter les motivations respectives de la direction du PT et des membres exclus. Il nous semble important que nos lectrices et lecteurs aient connaissance de ce document.
Le même jour, le 14 décembre 2003, dans un communiqué, le PT rapportait que: «Le député Walter Pinheiro (PT Etat de Bahia), représentant la tendance Démocratie socialiste [tendance dont est membre la sénatrice expulsée Heloisa Helena, figure nationale de la gauche du PT et dans laquelle s'identifient des couches populaires; le ministre du Développement agraire, Miguel Rossetto, est aussi membre de la tendance Démocratie socialiste...], a présenté à la Direction nationale du PT, après la votation de l'expulsion des quatre parlementaires du parti, un recours demandant que la prochaine Rencontre nationale rejuge à nouveau la décision prise contre la sénatrice Heloisa Helena. La DS [la direction de la tendance Démocratie socialiste] a dès lors demandé que la Rencontre nationale, prévue pour 2005, soit avancée. Le président du parti, José Genoino, a affirmé qu'il présentera la proposition d'avancer la date de réunion de la Rencontre nationale lors de la prochaine réunion de la Direction nationale du PT qui se tiendra au début de l'année à venir [2004].» Le calendrier des réunions n'est pas neutre: une alternative politique au cours social-démocrate du PT, qui trouverait une expression programmatique, unitaire et organisationnelle, se doit de faire face à des échéances politiques et électorales qui impliquent d'initier un processus de légalisation, c'est-à-dire la réunion de 500'000 signatures, au cours du deuxième trimestre 2004. En jouant la montre, la Direction du PT peut, de la sorte, neutraliser l'impact politique de l'expulsion des quatres parlementaires et en priorité d'Heloisa Helena. Elle peut cultiver aussi les hésitations. Il semble que la proposition de Démocratie socialiste ne contre pas avec sérieux les intentions, avouées ou inavouées, de la Direction du PT.
L'expulsion d'Heloisa Helena (DS), de Luciana Genro (députée du PT de l'Etat de Rio Grande do Sul et membre du MES - Mouvement de la gauche socialiste), de Joao Batista Baba (député du PT de l'Etat de Para) et de Joao Fontes (député du PT de l'Etat de Sergipe) a été accompagnée de très nombreuses démissions de personnalités de premier rang, parmi lesquelles les membres créateurs du PT, et de nombreux militants et militantes. Nous renvoyons nos lectrices et lecteurs aux articles qui sont et seront publiés sur ce site à ce propos. Il faut préciser que la réunion de la Direction du PT s'est tenue dans un hôtel de Brasilia, alors que le siège du PT se trouve à Sao Paulo. Le prétexte donné était le suivant: les membres de la Direction, députés, devaient être présents pour des réunions particulièrement importantes des deux Chambres du législatif. En réalité, l'intention politique était claire: non seulement superposer symboliquement le lieu géographique (Brasilia) de l'expulsion des députés qui s'opposaient au cours social-libéral du gouvernement Lula au siège du gouvernement, mais aussi de soustraire la Direction du PT aux pressions grandes des collectifs militants qui appuyaient les militants «radicaux», en particulier Heloisa Helena. D'ailleurs, à Brasilia, de nombreux militants ont essayé de forcer les portes de l'hôtel où la Direction nationale du PT gouvernemental donnait sa réunion. Ils ont été empêchés de pénétrer dans l'hôtel, un peu comme les salariés de la fonction publique n'avaient pu manifester dans le parlement lors de l'adoption de mesures frappant non pas seulement une mince couche de «fonctionnaires privilégiés», mais un ensemble large d'employés de la fonction publique. C.-A. U.
La Direction nationale du PT a approuvé au cours de l'après-midi de dimanche (14/12/2003) l'expulsion des députés João Baptista Babá (de l'Etat de Pará - PA) et Luciana Genro (Rio Grande do Sul - RS) et de la sénatrice Heloísa Helena (Etat d'Alagoas - AL). La décision a été prise par 55 voix contre 27 et aucune abstention. Vers la fin de la matinée du 14 décembre, la Direction avait déjà pris la décision d'écarter le député João Fontes (Etat de Sergipe - SE) par 55 voix contre 27 et 1 abstention. Les dirigeants du PT considèrent que ces parlementaires ont enfreint le code de conduite du PT et ont fait preuve d'un comportement opposé à ce que le parti avait déterminé.
La déclaration d'accusation, présentée par le secrétaire national en charge de l'organisation au sein du PT, Sílvio Pereira, et approuvée par la majorité des dirigeants du PT, comportait différents objectifs. Ce document entendait «vérifier l'irrespect des principes de fidélité et de l'unité du parti ; vérifier les initiatives en désaccord avec le principe rassembleur qui oriente le parti ; vérifier les collaborations développées avec des dirigeants de partis opposés au PT et au gouvernement fédéral ainsi que la désobéissance réitérée face aux orientations et aux résolutions adoptées par les instances du PT».
Lors du plenum de la Direction nationale, le président de la Commission d'éthique du PT, Danilo Camargo, a affirmé par la lecture de son rapport que «les conduites décrites dans la déclaration d'accusation de la Direction peuvent être qualifiées de graves et très significatives. Elles sont complètement opposées à l'objectif de renforcement de l'unité du PT, comportent une profonde hostilité, une attitude irrespectueuse et des offenses graves et réitérées à l'encontre de dirigeants et de leaders du PT, et y compris au prestige et aux membres du PT».
«Ils [les parlementaires] ont transgressé les règles statutaires et la Commission d'éthique décide majoritairement de suivre la Direction du parti qui demande leur expulsion», a affirmé Danilo Camargo.
Les parlementaires
Depuis la tribune de l'auditoire, la députée Luciana Genro a considéré les expulsions non pas comme le résultat d'un débat disciplinaire, mais comme le résultat d'un procès contre la contestation politique. «A la Commission d'éthique, nous n'avons pas été interrogés sur notre vote contre la réforme de la Prévoyance sociale, mais sur nos déclarations publiques à ce sujet» a-t-elle dit. Tout comme le député João Fontes, elle a critiqué l'orientation politique du parti: «le PT n'a pas organisé un débat au sein de sa base avant de décider du changement d'orientation politique» [par rapport à son opposition traditionnelle d'une réforme de la prévoyance sociale telle que le PT l'avait combattue à l'époque de Fernando Henrique Cardoso].
Le député Babá a utilisé les quinze minutes qu'il avait à disposition pour relever les positions du parti et les actions gouvernementales auxquelles il est opposé. Il a accusé la politique économique du gouvernement de créer le chômage et il a également rappelé que lors d'un précédent Congrès, le PT s'était opposé à la réforme de la Prévoyance sociale que le gouvernement de Fernando Henrique Cardoso [président avant l'arrivée de Lula au pouvoir] prévoyait de mettre en úuvre. Selon Babá, l'expulsion de ces parlementaires est le signe de la transformation du PT en un «New PT» [allusion au New Labour de Tony Blair]. «Je continuerai, avec les autres parlementaires expulsés, la lutte nécessaire pour le peuple brésilien», a-t-il conclu.
Heloísa Helena a été la dernière à prendre la parole et a utilisé seulement la moitié du temps qui lui était imparti. Elle a commencé et a terminé son intervention avec une voix étranglée. Heloísa a affirmé qu'elle défend aujourd'hui les mêmes positions que celles qu'elle défendait lorsqu'elle était leader du PT au Sénat et leader de l'opposition pendant le gouvernement de Fernando Henrique Cardoso. «Si le parti pensait que je défendais alors des positions fausses, vous auriez dû m'avertir lorsque j'étais leader de l'opposition au gouvernement précédent», a-t-elle affirmé.
La sénatrice a encore dit qu'elle ne pouvait pas demander la clémence ou faire des excuses comme certains parlementaires lui avaient suggéré avant cette séance de la Direction nationale. En effet, si elle l'avait fait, elle aurait «nié l'histoire du PT». «Il n'y a pas de place pour des excuses. Devant cette situation, il faut uniquement garder la tête haute. Car ceux qui m'expulsent aujourd'hui ne représentent pas le PT socialiste, le PT de la radicalité démocratique».
Le vote sur l'expulsion des parlementaires a été précédé par des témoignages favorables ou opposés à leur mise à l'écart. Cette séance de la Direction nationale a eu lieu à l'Hôtel Blue Tree Park à Brasília [sic]. Des manifestants et des membres du groupe «les amis de Heloísa» - créé il y a deux semaines avec l'objectif de défendre la sénatrice contre son expulsion du parti - se sont concentrés à l'entrée de l'hôtel et ont manifesté leur appui au maintien des députés au sein du PT. Les manifestants ont même tenté de passer en force afin d'accéder à la réunion, mais ils n'ont pas réussi à entrer dans l'hôtel.